Qui a tué Richie McCaw, épisode 10 : La fin.
Qui a tué Richie McCaw ? C'est l'heure de la révélation finale !
Mais bordel, qui a tué Richie McCaw ? On va enfin savoir ou vous continuez à vous foutre de notre gueule ? Ben oui on va savoir, ta gueule un peu.

Résumé des épisodes précédents :

Désolé, toujours pas. La flemme.
Vous pouvez néanmoins tous les relire ici :

Episode 1 : Le monde du rugby est en deuil

Episode 2 : Même dans son cercueil, Richie McCaw a l'air hors-jeu

Episode 3 : La recrue

Episode 4 : Rencontre avec Craig Joubert (1/2)

Episode 5 : Rencontre avec Craig Joubert (2/2)

Episode 6 : Le président

Episode 7 : Le mariage

Episode 7 & 8 : Le Mentor

BON SANG MAIS C'EST BIEN SÛR !

Soudain, tous les éléments se mettaient en place. Mon rêve, les invités du mariage, Boudjellal, l'ex-Secrétaire d'Etat… tout était devant mes yeux depuis le début. Limpide. Comment n'ai-je pas pu voir tout ça plus tôt ? La conclusion de mon enquête me ramène donc dans le Var. Il est temps que je confronte le coupable. Car aussi pourri et hors-jeu que pouvait l'être McCaw, « Tout homme mérite justice, même les plus félons d'entre eux », pour citer Daniel Herrero, mon nouveau mentor.

Je décide donc de retourner à Toulon, mais sous couverture, au vu de mes dernières aventures dans la région. Je sais bien que Mourad, Bernie et ses deux molosses ne feront pas la sieste éternellement. Dès qu'ils seront sur pieds, ils me traqueront. Leurs agents sont partout, tapis dans cette ville corrompue : les supporters du RCT, les journalistes de Var-Matin, même Mamie Jeanine, qui chaque matin au marché collecte toutes sortes d'informations et les fait remonter auprès de l'omnipotent président. Il me faut donc faire vite. Heureusement, trouver l'endroit où se planquait mon coupable a été assez facile, trop facile peut-être. J'ai étudié ses habitudes, sa routine. Je ne sais pas si un meurtrier revient toujours sur la scène de son crime, mais ce qui est sûr, c'est qu'un bodybuilder n'est jamais très loin d'une salle de gym.

MERCREDI — 21H00, CENTRE-VILLE DE TOULON

Je suis posté dans un café du centre ville. Ma cible a ses habitudes juste en face. Elle s'y rend plusieurs fois par semaine, toujours au rendez-vous, ponctuelle. L'heure approchant, je suis de plus en plus nerveux. Sûr de moi il y a encore quelques heures, je suis désormais cerné par les doutes. Ai-je vraiment trouvé le bon coupable ? Vais-je donc résoudre l'un des plus grands drames de l'Ovalie ? Cela va-t-il m'aider à décrocher un CDI ? A enfin pécho des meufs ? Ma montre Bob l'Eponge (waterproof !) glanée dans le dernier numéro de Picsou Magazine m'indique 21h : comme prévu, Il est là. Il entre dans le grand bâtiment gris, de style industriel. Je sors du café et je commence à le suivre. Il entre dans la salle de sport. Auparavant, il s'entraînait à la salle de musculation mise à disposition par son club, le RCT. Mais depuis quelques temps, Boudjellal a posté des videurs chargés de le refouler à l'entrée. La raison ? Il s'entraînait trop, beaucoup trop. Ses bras étaient devenus tellement hypertrophiés qu'il était désormais presque incapable d'armer une passe. Il ne pouvait plus retirer son t-shirt sans l'aide de plusieurs de ses coéquipiers. Il était en quelque sorte devenu un monstre, mi-homme, mi-David Marty. Il ne jouait plus beaucoup en club et s'était retrouvé isolé. Après quelques semaines de sevrage, il avait replongé, et avait décidé de s'inscrire clandestinement dans cette modeste salle de sport, fréquentée par les sportifs du dimanche, les kékés qui veulent faire les beaux à la plage, les célibataires endurcies et les vieilles ménopausées. Il portait désormais une épaisse barbe d'ermite, qui lui permettait de venir ici chaque jour de manière anonyme.

Je suis entré dans la salle. La première impression était désagréable, comme je m'y attendais. Je n'ai jamais compris les gens qui ressentaient le besoin de se tasser dans ces grands hangars respirant la sueur et la solitude, pour s'adonner à des séances de torture physique et auditive – mes oreilles sont d'ailleurs présentement en train de se faire agresser par une sorte de remix techno de Céline Dion. Me voilà cerné par les odeurs de transpiration, de travail, d'efforts. Un monde inconnu pour moi, assurément. Encore un peu sonné par mes précédentes aventures, je me sens agressé par les cliquetis métalliques de ces instruments de supplice. Je m'avance vers mon coupable, l'esprit embrouillé, le pas chancelant. Peut-être ai-je vraiment été enterré, là-bas dans la forêt ? Peut-être que je suis mort. Peut-être que cet endroit est mon enfer. En tout cas, il ressemble beaucoup à l'idée que je m'en fais.

Mais je n'ai pas le temps de divaguer. Mon homme est là, au fond de la salle, en train de pousser de la fonte, ses muscles saillants ruisselants de sueur. C'est un véritable colosse. En cas de confrontation physique, je n'ai aucune chance. Je glisse la main dans la poche de mon pantalon, et saisis la fléchette anesthésiante que Daniel Herrero m'a remise avant que je quitte sa hutte. S'il esquisse ne serait-ce qu'un geste, s'il tente de fuir, je n'hésiterai pas à la planter profondément sous sa peau. Du moins s'il est possible de la transpercer avec un quelconque objet – plus je m'approche de lui, plus j'en doute. Prenant mon courage à deux mains, je m'avance vers lui, racle le fond de ma gorge et me prépare pour le grand final. Mais à ma grande surprise, c'est lui qui s'adresse à moi en premier.

— Alors ça y est, vous m'avez trouvé.

Visiblement, il s'attendait à ce que je vienne le chercher. Il avait l'air très calme, posé. Il pose sa barre de développé-couché, s'éponge rapidement le front et les bras.

— Oui, je t'ai trouvé. Je sais ce que tu as fait, Pierrick.

— Bien.

— Reste où tu es. Tu n'as nulle part où aller.

— Je n'ai aucune intention de m'enfuir. Je suis prêt. J'attends le châtiment.

— Laisse les bondieuseries de côté avec moi. Tu t'entretiendras avec ton Dieu plus tard si tu le souhaites. Pour l'heure, il est temps de faire face à la justice.

— Ainsi soit-il. Dans ce cas, je plaide coupable. Je l'ai fait. J'ai tué Richie McCaw. Mais sachez que je n'en retire aucune fierté.

— Mais pourquoi alors, Pierrick ? Pourquoi toi ?

— C'est une longue histoire... et un terrible malentendu. Je ne voulais pas mal agir. Je voulais juste accomplir la volonté du Seigneur.

— Tu es en train de me dire que Dieu t'a demandé de tuer Richie McCaw ?

— …

— Attends, avec toutes les injustices commises sur Terre, la priorité pour Dieu, c'était d'éliminer Richie McCaw ? Ok, le gars était une enflure, mais quand même !

— …

— C'est la finale de la Coupe du monde qui lui restait en travers de la gorge, c'est ça ? C'est bizarre, quand je visualise Dieu, je vois un vieux mec en toge avec une barbe blanche. Pas un type avec un maillot du XV de France qui crie « aux chiottes l'arbitre » ! Enfin après tout, s'il nous a fait à son image, il doit probablement être aussi con que nous. J'imagine que même lui ne comprend pas la règle du plaqueur-plaqué.

— Les sarcasmes et les blasphèmes sont inutiles. Je vous l'ai dit, j'ai décidé de me rendre. Je ne veux pas me battre.

— Et moi je veux juste comprendre.

— Très bien... alors je vais vous expliquer.

— …

— Tout a commencé il y a de cela plusieurs mois. Comme vous le savez, j'étais dans une situation assez difficile au club. Je jouais de moins en moins, à cause de la concurrence de toutes ces stars de l'hémisphère sud. Je me posais des questions sur mon avenir, je discutais régulièrement avec mon ami Virgile Bruni, qui avait lui décidé de signer à l'USAP pour avoir plus de temps de jeu. C'est précisément à ce moment-là que la rumeur a commencé à s'ébruiter en ville. Richie McCaw serait venu sur la Rade afin de rencontrer Mourad Boudjellal. Le capitaine des All Blacks, qui avait jusque-là toujours exclu la possibilité d'un exil, souhaitait finalement toucher un dernier contrat lucratif en Europe. Tout cela a bien évidemment renforcé mes doutes. J'étais tourmenté, je ne dormais plus la nuit... alors comme souvent, je me suis réfugié dans la musculation. Jour et nuit, je poussais de la fonte. Mourad a vu que j'étais en train de bousiller ma santé, et m'a interdit l'accès de la salle de musculation du club. Je suis donc venu m'entraîner ici. J'avais un deal avec Francky, le gérant de la salle, qui m'avait donné les clefs pour que je puisse venir m'entraîner ici après les heures de fermeture, seul. Et une nuit, alors que je me tuais à la tâche, j'ai reçu un SMS...

— Quel SMS ?

— Le voici.

Qui a tué Richie McCaw, épisode 10 : La fin.

— Qu'est-ce que... ?

— Je n'avais plus toute ma tête, à force de me punir physiquement, à force de ne plus trouver le sommeil. Quand j'ai lu « pape », j'ai cru qu'il s'agissait d'un message de notre Saint-Père, le Pape François. J'ai cru qu'il m'investissait d'une mission divine, qu'il me demandait de tuer Richie McCaw. Alors je l'ai fait. J'ai pris le premier vol pour la Nouvelle-Zélande. Je l'ai traqué. Je me suis caché dans son avion. La suite, vous la connaissez...

— Mais...

— Ce n'est qu'après, lors de mon retour en France, que j'ai compris mon erreur. Il ne s'agissait en effet pas d'un message du Pape, mais d'un SMS de Pascal Papé. Je l'avais rencontré lors de mon stage avec le XV de France en 2012 et nous avions sympathisé. Je suppose qu'il voulait juste être gentil et faire une blague en disant « qu'il fallait tuer Richie McCaw ». J'avoue que parfois, je suis un peu premier degré. Ca a fini par me jouer des tours.

— Mais... mais... mais... cette histoire est parfaitement ridicule.

— C'est pourtant la triste vérité. C'est une terrible méprise. Une simple blague qui a coûté la vie d'un homme. Je ne peux m'en prendre qu'à moi-même.

Je suis resté là, sur place, hébété. J'avais tout imaginé. Un complot mondial visant à éliminer le troisième ligne le plus casse-couilles de la planète. Un Président despote, vexé de ne pas avoir réussi à signer sa star néo-zélandaise, et désireux de se venger. J'avais même songé à une histoire d'amour secrète et passionnelle entre le porc-épic le plus célèbre du pays au long nuage blanc et Craig Joubert, l'homme qui lui avait permis de réussir son plus beau méfait en 2011. Un truc qui a de la gueule, quoi. Au final, ce n'était qu'une simple histoire de SMS mal interprété par un mec un peu trop accro à la muscu et aux osties. Non... il devait y avoir autre chose. Ca ne pouvait pas qu'être ça. La mauvaise musique et le bruit infernal des appareils de torture commencent à me monter sérieusement à la tête. Tout devient flou, je sens que je perds l'équilibre. Puis là, d'un coup, une détonation. Je me suis retourné pour voir d'où le bruit venait. J'ai alors vu Mourad Boudjellal en face de moi, avec un fusil de chasse entre les mains. Il l'avait probablement emprunté à Bakkies Botha. Le Président du RCT avait un regard de possédé, et un sourire sadique et satisfait sur les lèvres.

Ce n'est qu'au moment où j'ai senti un liquide chaud et visqueux sur ma bedaine d'alcoolique que j'ai compris ce qu'il venait de se passer. J'ai alors vu l'Ultime Prédatrice. La Grande Faucheuse. Elle était assez conforme à l'idée que je m'étais faite d'elle : elle ressemblait à Thierry Dusautoir, mais avec un air plus sympathique. Elle m'a tendu la main. C'était l'heure, je suppose. Et pour la première fois de ma vie, je n'avais pas envie d'être en retard.

Epilogue.

A mon grand âge, je commence à avoir l'habitude d'écumer les enterrements. Je suppose que c'est là l'évolution logique de la vie : d'abord les booms de pré-adolescents, puis les soirées beuverie en boîte de nuit, puis les banquets fastueux de la FFR, puis enfin, les enterrements. Mais je peux témoigner que je n'en avais jamais vu un aussi minable que celui du super-héros autoproclamé Ovale Masqué. Le tout avait été organisé en toute discrétion, dans une petite chapelle miteuse, paumée au fin fond de la Bretagne. On était loin des funérailles très médiatiques de Richie McCaw. L'endroit était aussi rempli que pour un match du Racing Métro 92. Au premier rang, devant le cercueil, j'ai cependant reconnu Maxime et Nicolas, les créateurs du Rugbynistère. Le second pleurait à chaudes larmes dans les bras de son compère. Il semblait inconsolable.

— Tu te rends compte Max... putain, pas Ovale Masqué, pas lui ! Ca va faire 5000 clics en moins par semaine !

— Je sais Nico, je sais. Mais t'en fais pas. On va surmonter tout ça. On postera plus de calendriers de rugbywomen à poil, voilà tout !

— Tu as raison... ah, toi, tu sais toujours comment me parler !

Un peu plus loin se trouvait Damien Try, l'ex-numéro 2 et bras droit du défunt. Il semblait fortement alcoolisé, et criait à qui veut bien l'entendre « Mourir, c'était mon idée ! Ca aussi il me l'a piqué ! Depuis le début ! ». Mais personne ne l'écoutait. Le pauvre se laissait complètement aller depuis qu'il avait perdu la bataille juridique pour prendre la succession d'Ovale Masqué. On murmurait même qu'il avait arrêté le jogging. A ses côtés, se trouvait Gregory le Mormeck, exprimant sa douleur par le seul moyen qu'il connaissait, la nourriture, en s'empiffrant de kouign-aman achetés à la boulangerie du coin. Pastigo, lui, n'était finalement pas venu, en raison du prix « exorbitant » du billet de train et de l'absence de menu proposant des patates avec du fromage. Pour la petite histoire, la Boucherie Ovalie avait finalement été cédée au Stagiaire, qui avait décidé de la renommer « Valeursdurugby.com » et qui avait complètement révolutionné la ligne éditoriale. L'insertion du chat d'Hello Kitty sur la bannière du site, ainsi que la diffusion massive de clips de Coldplay entre les articles (qui étaient désormais tous des diaporamas) avaient notamment provoqué la colère des lecteurs de la première heure. C'était mieux avant, qu'ils disaient. Quand le Chef était encore là. Si vous voulez mon avis, je ne pense pas vraiment qu'on puisse considérer la mort d'un crétin comme Ovale Masqué comme autre chose qu'un progrès pour l'humanité. Malgré tout, je m'étais attaché au garçon, comme on peut s'attacher à un chien errant. Un pauvre bâtard, laid comme un pou, avec une patte en moins et qui est trop fainéant pour aller chercher le bâton que vous avez bien voulu lui lancer pour égayer un peu sa triste vie. Mais malgré tout ça, il a cette petite lueur au fond des yeux, ce truc qui nous fait dire qu'il a quand même un bon fond, même s'il est très très con.

Après avoir rendu un dernier hommage à celui qui fut mon employé, j'ai aperçu une silhouette franchir la porte de la Chapelle. Il s'agissait de mon contact. Je lui avais demandé à ce que l'on se retrouve ici, à l'abri des regards. Il était venu incognito. Son visage était caché par une capuche sombre. Après une brève poignée de mains, il s'est adressé à moi.

— Bonjour, Renvoi Profond. Alors, tout a marché comme prévu ?

— Parfaitement, Chef. Tout le monde pense que Gunther l'a fait.

— Vraiment ? Personne ne remet en cause la version officielle ?

— Non, personne.

— Putain. Pourtant, c'est gros comme histoire... j'en reviens pas que tout le monde l'ait gobée.

— Comme on dit, plus c'est gros, plus ça passe. C'est un peu comme les passes en Top 14, plus elle sont en avant, moins elles ont de chance de se faire siffler.

— C'est pas faux. Et Masqué, il ne se doutait de rien, lui ?

— Attends, t'as vu le genre du gars ? Il pensait qu'il avait le bon coupable. Ca aurait été trop dommage qu'il réussisse un seul truc dans sa vie. Puis comme tu le vois, cet éventuel problème est réglé lui aussi.

— Je vois. Et Gunther ? Tu penses qu'il va parler ?

— Non, t'en fais pas, le petit est fiable. On lui a promis que s'il jouait le jeu, une fois en prison, il pourrait s'adonner à ses deux passions : la lecture de la Bible et la musculation. Il est donc actuellement l'homme le plus heureux du monde. Il ne nous posera pas de problèmes.

— Et Papé ? Il n'aura pas de problèmes ?

— Il a été innocenté par la justice, qui a estimé qu'il n'avait rien prémédité dans l'affaire. Enfin, il a juste pris une amende pour outrage à magistrat après avoir envoyé un coup de boule à un juge, mais c'est anecdotique. Quant à Boudjellal, on a perdu sa trace. Selon certaines rumeurs, il aurait pris la fuite en Afrique du Sud pour y fonder une secte et échapper à son procès. Je pense que le monde du rugby n'entendra plus parler de lui de sitôt.

— Parfait. Tout se passe donc comme prévu.

— Oui.

Satisfait, l'homme encapuchonné m'a alors tourné le dos, et s'est dirigé vers la sortie. Je l'ai retenu par le bras.

— Une dernière chose...

— Oui ?

— Bonne chance pour 2015, Philippe.

FIN.



Merci à Flora Friz, Nicole Alamasse, Capitaine, l'Affreux Gnafron, Marcel Caumixe, Marinette, EyegougeMcCaw et enfin à Damien Try qui avait évidemment eu l'idée en premier (mais qui avait été assez intelligent pour ne pas l'écrire).

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ÉNORME!! LE coup de la faucheuse et de Titi est magistral 😊 RIP Ovale Masqué!

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