Santé mentale, le combat de Rodrigo Capo Ortega après le rugby
Rodrigo Capó Ortega se livre sur sa transition compliquée hors des terrains. ©Nathan Heuillet
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Aux côtés de la LNR, Rodrigo Capo Ortega promeut l'importance du bien être mental, chose qui lui à joué de mauvais tours lors de son après carrière

1er mars 2020, Rodrigo ne le sait pas encore, mais à Bordeaux, il vient de marquer le dernier essai de sa longue carrière sous le maillot du Castres Olympique.VIDÉO - Replongez dans les meilleurs moments de Rodrigo Capo OrtegaVIDÉO - Replongez dans les meilleurs moments de Rodrigo Capo OrtegaÀ bientôt 40 ans, le deuxième ligne s’était promis une ultime saison, entouré de ses coéquipiers de toujours. Motivé par ce titre de champion de France, glané deux ans plus tôt, au nez et à la barbe des grosses cylindrées du Top 14. Mais deux semaines après ce déplacement à Bordeaux, la France s’arrête net, plongée dans une crise sanitaire sans précédent. Et Rodrigo, sans encore vraiment le réaliser, vient de tourner la page. Il n’est plus un joueur de rugby.

Arrivé à Millau au tout début des années 2000 avant de poser, un an plus tard, ses valises dans le Tarn à Castres pour devenir joueur de rugby professionnel.
Là-bas, il va trouver bien plus qu’un club : une famille, une terre d’adoption. Ici, il s’est senti chez lui, au point de ne jamais quitter Castres, cette ville devenue la maison de Rodrigo Capo Ortega.

Preuve en est, il est encore difficile de l’approcher un matin de marché sur la place Jean-Jaurès sans croiser les aficionados du C.O, venus le saluer, échanger un mot, une accolade. Bientôt cinq ans ont passé depuis qu’il a quitté les terrains, mais dans le cœur des Castrais, Rodrigo n’a jamais vraiment raccroché.

Rodrigo Capo Ortega : "Pendant 18 ans, j'ai vécu dans une bulle"

Ce sont ces mêmes supporters qui lui rendent ce dernier hommage, un jour d’avril 2022, après une longue période de confinement. Rodrigo, toujours au bras de sa femme Julie, trône sur la pelouse du Stade Pierre-Fabre durant de longues minutes, sous les acclamations d’un public conquis.
Mais pour le colosse uruguayen, les ennuis ne faisaient alors que commencer.

"J’avais essayé d’anticiper mon après-carrière, j’avais un diplôme d’entraîneur, et un diplôme de coach mental. Préparer l’après-carrière, ça veut tout dire et rien dire, car j’étais vraiment dans le déni de me dire que je n’allais plus être joueur de rugby. Je n’imaginais pas ne plus pouvoir faire ce qui me rend le plus heureux au monde, entrer sur un terrain de rugby et courir après un ballon."

"Pendant 18 ans, j’ai vécu dans une bulle, où je me lève tous les matins pour faire quelque chose de merveilleux. Tous les samedis, pendant 80 minutes, c’est tous mes problèmes qui s’envolent, alors quand ça s’arrête, forcément que c’est très dur."

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La débauche commence petit à petit à imposer un quotidien malsain à Rodrigo, qui entre dans une profonde dépression, entre alcool et excès, ce dernier peine à garder le cap et touche le fond, sous les yeux de sa famille.

"Le déni a vraiment joué une part importante dans ma dépression, dans la position où j’étais, je n’étais pas digne de prendre quelconque décision. J’ai eu la chance d’avoir ma famille auprès de moi, j’étais en train de me noyer, c’est ma femme et ma fille qui m’ont aidé à m’en sortir."

Le déclic pour Rodrigo Capo Ortega : la fois de trop

C’est encore difficile de parler de cette période pour Rodrigo. Lui qui n’a jamais plié, ni triché durant sa vie de sportif, cette fois, il s’avoue vaincu face à ce mal qui le ronge et le pousse, ce soir-là, à commettre la faute de trop.

"Un soir à la maison, je suis allé trop loin, ma femme est vite montée à l'étage parce qu'elle avait peur. J'étais devenu très violent, très agressif, et ma belle-mère descend en me disant Rodrigo, on a appelé l'ambulance, ils viennent te chercher, après ça j'ai dormi pendant 48 heures et je me suis retrouvé dans une clinique, pour une cure de désintox". 

"Le déclic est intervenu à ce moment-là, quand ma femme m'a déposé là-bas, j'étais choqué de voir ces gens arriver dans un état si compliqué. Ma femme ne voulait pas me laisser là, mais j'avais atteint un seuil ou il fallait que je travaille sur moi-même, que je comprenne ce qui n'allait pas".

"Pendant deux semaines, j'étais seul, loin de ma famille, et j'ai appris au contact des professionnels de santé. J'ai compris mon mal-être, ce qui n'allait pas bien pour moi et les raisons de mon comportement. C'est à partir de cette étape que j'ai commencé à me sentir mieux".

VIDEO. Top 14 - Rodrigo Capo Ortega, l'âme et le coeur du Castres OlympiqueVIDEO. Top 14 - Rodrigo Capo Ortega, l'âme et le coeur du Castres Olympique

La thérapie avant la transmission et la Ligue Nationale de Rugby en levier

Aujourd'hui Rodrigo va mieux, ça se sent, il confie avoir retrouvé une vie paisible, toujours auprès de sa famille à Castres. Mais cet épisode traumatisant, il a décidé de s'en servir pour sensibiliser les joueurs du Top 14. Aux côtés de la Ligue Nationale de Rugby, il va faire le tour de France des clubs professionnels pour sensibiliser au mieux les joueurs professionnels, sur l'importance de la santé mentale.

"Si je peux permettre aux joueurs de ne pas vivre la moitié de ce que j'ai vécu, c'est une petite victoire pour moi. Je suis content de faire partie de ce projet, il y a beaucoup de choses à faire sur ce terrain, mais c'est un sujet qu'il faut aborder avec beaucoup de respect et de délicatesse. Chaque personne est différente". 

Propos recueillis par Nathan Heuillet à Castres.

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