Décryptage. Du panache à la panique : après un nouveau naufrage, le rugby gallois en quête d’un ouvreur 'sauveur'
Après la défaite 73-0 contre l'Afrique du Sud à domicile, le pays de Galles continue de plonger en pleine crise, à la recherche de son ouvreur providentiel. Crédit image : Screenshot Youtube beIN SPORTS France
Le pays de Galles a connu un nouveau revers à domicile, avec une cinglante défaite sur le score de 73-0 face aux doubles champions du monde sud-africains.

148… c’est le nombre de points encaissés par le pays de Galles sur leurs trois derniers tests internationaux, tous à domicile. Deux défaites sur des scores fleuves contre la Nouvelle-Zélande (26-52) et l’Afrique du Sud (0-73) et une victoire à l’arrachée contre le Japon (24-23). Autant de résultats dans le prolongement du Tournoi des 6 Nations, avec trois cuillères de bois d’affilée pour le XV du Poireau (2025, 2024, 2023).

Le Pays de Galles est donc passé derrière l’Italie dans la hiérarchie, rattrapé également par la Géorgie qui revendique une place dans l’élite du rugby européen actuel. Si on ajoute à cela les problèmes financiers de la fédération galloise, avec une réforme visant à réduire le nombre de clubs professionnels de quatre à deux franchises, les coéquipiers d’Aaron Wainright s’enfoncent dans une crise nationale.

D’autant plus que le pays n’arrive pas à conserver ses meilleurs joueurs, qui préfèrent partir à l’étranger pour continuer d’évoluer au meilleur niveau possible (Tomos Williams, Adam Beard, Louis Rees-Zammit…). Ce qui entraîne de nombreux manques dans l’effectif des Diables Rouges, en particulier sur le poste de demi d’ouverture.

Le chantier de l’ouverture

Depuis le départ à la retraite de son ouvreur fétiche Dan Biggar, le pays de Galles est à la recherche de son homme providentiel au poste de numéro dix. Le XV du Poireau a toujours eu de grands demis d’ouverture par le passé, avec des joueurs comme Barry John, Neil Jenkins, Stephen Jones ou encore James Hook. Mais les Gallois n’arrivent pas à trouver le digne successeur de Dan Biggar dans la nouvelle génération. Le Bayonnais Gareth Anscombe a été utilisé par moment, mais à 34 ans, il ne représente pas l’avenir du poste.

Parmi les options en vue de la prochaine Coupe du monde, Dan Edwards représente une solution intéressante. Après des débuts réussis en URC avec les Ospreys en 2023, le joueur de Swansea est un excellent animateur, n’hésitant pas à attaquer la ligne d’avantage avec de très bons appuis. Il possède également une très belle passe et un jeu au pied très précis face aux perches. En revanche, ce n’est pas un gros défenseur et il n’a pas un physique comme celui de Dan Biggar, qui rendait l’ancien joueur du RCT très performant sous les ballons hauts.

Dans le même profil de numéro dix animateur, plutôt petit, avec des grosses qualités offensives, on retrouve Callum Sheedy et Jarrod Evans. Deux joueurs passés par le championnat anglais. Le premier s’est distingué avec Bristol, remportant la Challenge Cup lors de la saison 2019-2020, avant de signer avec Cardiff. Tandis que Jarrod Evans a réalisé le chemin contraire, en débutant avec Cardiff en 2015, puis en intégrant le club des Harlequins, en tant que doublure de Marcus Smith en 2023. Ces deux ouvreurs sont plus âgés que Dan Edwards et ils n’ont jamais réussi à avoir une influence importante dans le jeu de leur équipe nationale. D’abord barrés par la présence de Dan Biggar, ensuite par des blessures.

Dans le profil traditionnel des demis d’ouverture gallois, avec un jeu au pied long et de pression, un gros physique et des qualités défensives, Ben Thomas est le joueur qui se rapproche le plus de cette description. Le natif de Cardiff peut évoluer au poste de numéro dix et de premier centre, avec un physique proche du Sud-Africain Sacha Feinberg-Mngomezulu.

Son association avec Dan Edwards pourrait être une solution pour le Pays de Galles, avec deux joueurs créatifs possédant un bon jeu au pied en 10 et 12. L’Angleterre avait réalisé ce type de composition en alignant George Ford avec Owen Farrell. Le poste d’ouvreur reste donc un point d’interrogation dans cette équipe galloise, surtout pour trouver la meilleure combinaison avec Tomos Williams, véritable leader du XV du Poireau.

Tomos Williams seul au monde

Tomos Williams faisait partie des deux seuls Gallois sélectionnés pour la tournée des Lions britanniques et irlandais avec le troisième ligne Jac Morgan. Le demi de mêlée est un des seuls joueurs capables d’amener de l’incertitude et de la magie chez les Gallois (sans oublier l’arrière Blair Murray, toujours excellent). Il a d’ailleurs été élu meilleur joueur de la saison 2024/2025 de Premiership.

Le numéro neuf de Gloucester ne cesse d’impressionner, que ce soit en Premiership ou au niveau international. Porté par une qualité de passe impressionnante, Tomos Williams ne cesse de créer des espaces pour ses coéquipiers. Des intervalles qui ne sont pas toujours bien exploitées par ces coéquipiers en sélection. Ce manque de confiance se fait ressentir dans le jeu gallois, avec des prises de balles avec peu de profondeur et sans aucun risque dans les choix effectués.

Malheureusement, Tomos Williams n’a pas pu exprimer tout son talent lors de la tournée des Lions, suite à une blessure aux ischios-jambiers lors du premier match en Australie contre la Western Force. Une absence qui s’est fait ressentir du côté des Dragons Rouges, puisqu’il ne possède pas vraiment de concurrence en équipe nationale. Kieran Hardy et Reuben Morgan Williams sont en effet bien moins complets que le numéro neuf de Gloucester et ne possèdent pas la même capacité à peser sur les défenses adverses.

Tomos Williams représente donc une des rares éclaircies dans le ciel gallois ces derniers temps. D’autant plus que le Pays de Galles ne semble pas avoir tourné la page de l’ère Warren Gatland. Une période durant laquelle les coéquipiers d’Alun Wyn Jones, Jamie Roberts, George North, Shane Williams ou encore Jonathan Davies ont dominé le rugby européen avec un jeu très direct. Un style efficace, avec des courses droites de la part des lignes arrières, une fixation constante du premier centre et un jeu au pied de pression.

Une stratégie qui fonctionne à condition de posséder une défense particulièrement solide et des avants dominants comme l’étaient Sam Warburton, Ken Owens, Talupe Faletau… Or ce n’est plus le cas actuellement et les avants gallois fixent bien moins leurs adversaires. On l’a notamment vu face à l’Afrique du Sud, avec un score de 73-0 qui reflète bien la physionomie de la rencontre, puisque le XV du Poireau ne s’est pas créé d’occasions dangereuses.

La situation est donc particulièrement critique pour le Pays de Galles qui espère se sauver en restructurant son rugby de province, avec deux clubs au lieu des quatre actuels (Cardiff, Ospreys, Dragons et Scarlets). Les Gallois peuvent cependant essayer de se reconstruire sur le modèle italien, qui s’appuie essentiellement sur la franchise de Benetton Trévise en URC. Avec des jeunes joueurs qui pourront se développer au sein d’une même équipe et trouver des repères collectifs avant d’affronter le niveau international. Même si les résultats des moins de 20 ans gallois ne sont pas forcément concluants, avec un seul trophée depuis la création de cette catégorie en 2008 (un Grand Chelem en 2016).

Une chose est sûre, le pays de Galles doit commencer à installer des joueurs avec un gros potentiel sur des postes clés comme celui de numéro dix. Dan Edwards est évidemment très loin d’avoir le niveau d’un Romain Ntamack, George Ford ou Beauden Barrett. Mais si des joueurs comme lui arrivent à s’installer en équipe nationale, le XV du Poireau pourra retrouver une bonne génération sur du long terme. La route reste en tout cas très longue pour le rugby gallois, qui affrontera l’Angleterre, les Tonga et le Zimbabwe lors du prochain mondial en Australie.

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