Présidence FFR - Florian Grill : ''Le management de Bernard Laporte est d’une violence extrême''
Présidence FFR - Florian Grill : ''Le management de Bernard Laporte est d’une violence extrême''
Président de la Ligue Île-de-France, et adversaire de Bernard Laporte pour l'élection à la présidence de la FFR, Florian Grill a répondu à nos questions. Au programme : la reprise, la campagne et sa liste.

Quatre clubs pros sont touchés par des cas positifs du Coronavirus, deux matchs amicaux ont déjà été annulés. Côté amateur, au niveau territorial, est-ce qu’on a pensé à un plan B si la saison ne peut reprendre en septembre ?

Je ne peux pas parler pour l’ensemble des ligues, mais en Île-de-France, on a imaginé deux hypothèses : une reprise à la Toussaint, et une reprise en janvier. C’est important de prévoir un plan B, j’espère que c'est le cas pour toutes les ligues.

Qu’est-ce qui pousserait à faire d’une de ces hypothèses, une réalité ?

Ce ne serait pas notre décision ! Elle viendrait sur incitation des pouvoirs publics. Il faut aussi respecter les consignes fédérales en la matière. Dans ce genre de situation, il y a une hiérarchie, et une cascade de décisions qui part de l’Etat, qui va ensuite vers la Fédération puis aux ligues. Elles ne peuvent pas tout décider, seules dans leur coin.

Imaginons qu’un club francilien évoluant en Honneur ou PH soit touché par le Coronavirus, avec des joueurs testés positifs. Concrètement, qu’est-il prévu ? 

Ce qui est prévu aujourd’hui, c’est que les joueurs soient mis en quarantaine pour les sortir du périmètre de l’équipe. Si ce genre de problématique arrivait, le risque de propagation serait assez conséquent, et il faudrait prendre des mesures : ça irait dans le sens d’un plan B. Mais encore une fois, ce n’est pas au niveau d’une ligue qu’on peut décider.

Et d’autres formes de jeu, avec des matchs de toucher ou du rugby à 5, ce serait une solution ?

En Île-de-France, on est en pointe sur le rugby à 5, donc c’est une éventualité à laquelle on a pensé. Sur 150 clubs, on a pratiquement 100 clubs qui ont une section de rugby à 5. Si la possibilité nous était donnée, on serait en capacité d’organiser quelque chose. On pourrait jouer sans contact sur grand terrain (le rugby à 5 se joue sur demi-terrain en largeur, ndlr), pourquoi pas à 10vs10… Là, on parle de plan C. Mais il est trop tôt pour être dans le catastrophisme. J’ose espérer qu’on puisse avoir une saison qui se déroule à peu près normalement. Au moins d’un point de vue sportif. 

Quid des écoles de rugby ?

Pour l’instant, on est aussi dans l’attente des décisions fédérales et gouvernementales. Ce qui est positif, c’est qu’on est déjà sur des pratiques “je joue au contact” et “toucher + 2 secondes”, donc on connaît bien. Quoiqu’il arrive, on ne sera pas les deux pieds dans le même sabot, avec rien. Mais il peut ne rien y avoir si l’Etat le décide.

L’autre actualité qui vous concerne directement, c’est la campagne pour l’élection à la présidence de la FFR. Vous vouliez reporter ces élections, ce qui a été refusé par la Fédération... Pourquoi avoir réclamé un report ?

Parce que c’est un non-sens absolu de faire une AG élective, avant d’avoir fait une AG financière : les clubs vont devoir voter à l’aveugle. La Fédération Française de Rugby est la seule qui anticipe la date : depuis vingt ans, les élections ont lieu en décembre (elles auront lieu le 3 octobre 2020, ndlr) et toutes les autres Fédérations les repoussent, c’est surréaliste. Ensuite, c’est une évidence que la campagne a été mise en parenthèse pendant deux mois, avec la crise. Par décence, avant d’avoir dépassé le pic de la pandémie, on a arrêté de communiquer. Depuis, on communique avec Zoom, ce qui n’est pas exactement pareil que de voir les clubs les yeux dans les yeux… Donc les conditions de la campagne n’ont pas été optimales, sachant en plus que la FFR nous a refusé l’accès à la base de données des clubs. Les raisons sont donc claires, et le comité éthique a stipulé qu’un report aurait été préférable.

La ministre avait laissé la possibilité de repousser les élections jusqu’à avril 2021, ça laissait de la marge. Et on voit maintenant que le CNOSF a confirmé, et nous a donné raison dans ses conclusions.

Quel est votre sentiment face à ce refus de la FFR ?

Une fois de plus, le management de Bernard Laporte est d’une violence extrême. Il n’écoute pas, et n’en fait qu’à sa guise. Il avait été violent dans le licenciement de Guy Novès avec un audit qui n’existait pas, et on sait ce que ça a coûté au rugby français. Il a été violent dans la manière - même s’il était légitime de le faire - de sortir du contrat avec les collectivités (pour le Grand Stade, ndlr), ce qui a coûté 3,3 millions d’euros au rugby français. Alors que des clauses permettaient de sortir du contrat sans frais. Il a été violent avec le constructeur : là, on a une affaire pendante avec une demande d’indemnisation à hauteur de 19 millions d’euros. Alors, on ne perdra pas autant mais ça fait quand même froid dans le dos, pour de la faute de gestion.

Il est violent avec la Ligue Nationale de Rugby au point que le calendrier des matchs internationaux n’est toujours pas acté, et qu’il y a une guerre fratricide, alors qu’on aurait besoin que la Ligue et la FFR travaillent ensemble. Il est violent avec nous, le CNOSF, le comité éthique qu’il n’écoute que lorsque ça l’arrange. Il nous parle beaucoup de démocratie, mais il manage comme si c’était son argent et sa Fédération. Mais ce n’est pas son argent, et ce n’est pas sa Fédération. On n’est que de passage, et c’est troublant de voir ça. Je vous le dis comme je le pense : si Bernard Laporte manage France 2023 comme il le fait depuis quatre ans avec la FFR, on court à la catastrophe.

Je ne remets pas en cause ses compétences d’entraîneur, ses résultats parlent pour lui. Mais je remets vraiment en cause ses capacités en tant que président.

Vous en parliez brièvement, mais la FFR et la LNR semblent reparties pour une nouvelle guéguerre. On comprend les arguments de tout le monde, encore plus avec cette crise. Le problème, c’est qu’on dit ça depuis des années...

Mais écoutez, comment voulez-vous qu’il puisse y avoir une relation de confiance, entre la FFR et la LNR, alors que dès le lendemain de son élection, Bernard Laporte a demandé la tête de Paul Goze (président) et d’Emmanuel Eschalier (directeur général) lors d’une réunion avec la Ligue ? On ne discute pas, et on ne négocie pas avec un fusil sur la tempe : ce n’est pas possible. Il faut qu’il y ait un minimum de confiance pour que ça fonctionne. Or, depuis quatre ans, c’est une terreur permanente, et on ne fait pas avancer le rugby. Le dernier épisode n’est que la continuation de ce qu’on vit depuis quatre ans, c’est-à-dire l’enfer

On a la chance d’avoir deux moteurs en France. Si on veut avoir une stratégie, il faut coupler ces deux moteurs, et ne pas les faire fonctionner chacun dans leur coin. La proposition de la Ligue (faire jouer cinq matchs au lieu de six, ndlr) me paraissait plus que raisonnable. Je ne sais pas si la Fédération se rend compte que le fait de ne pas boucler d’accord rend le remplissage des stades si compliqué ! Remplir un stade de 80 000, si on a le droit de le remplir ce dont je doute, ça ne se fait pas en quelques semaines. Plus on continue ce bras de fer stérile et contre-productif, plus on prend le risque de ne pas pouvoir remplir le stade. 

Mais la Ligue et la Fédération peuvent-elles réellement marcher dans la main ? Si vous étiez en place, que préconiseriez-vous ?

Quand vous voulez discuter avec quelqu’un, la première chose, c’est de s’intéresser à ses problèmes. Mais il faut avoir un minimum de capacité d’écoute : ça ne veut pas dire que vous ne négociez pas, mais sans écoute ou confiance, c’est impossible d’avancer. J’ai lu le plan stratégique de la Ligue Nationale de Rugby à horizon 2023. Il est très clair, avec deux enjeux. Un, le problème de couverture géographique. Deux, un problème de rajeunissement du spectateur. Moi, je partirais des problèmes de mon interlocuteur pour trouver des solutions gagnant-gagnant, qui nous permettent d’aider la Ligue. Et à l’inverse, elle nous aiderait sur des problématiques propres à la Fédé, comme l’aide que les clubs doivent apporter au rugby amateur. Mais pour ça, il ne faut pas faire preuve de la surdité permanente dont Bernard Laporte fait preuve avec les gens, dès lors qu’ils ne sont pas d’accord avec lui. C’est insensé, et à l’opposé de l’image du rugby. Il faut rassembler : on ne peut pas se priver de la moitié des bénévoles, et s’opposer au rugby professionnel. C’est complètement dément, on est dans un chaos invraisemblable.

Vous avez récemment annoncé votre Liste pour Ovale Ensemble : racontez-nous un peu comment celle-ci a été constituée.

D’abord, pour le dire avec le coeur et les tripes, c’est extrêmement difficile. C’est à la fois un casse-tête et un crève-coeur : dans le cadre d’Ovale Ensemble, il y a près de 450 personnes qui travaillent sur la campagne, bénévolement. Les 38 choisis ont donc une responsabilité énorme, ils s’engagent au nom d’un collectif bien plus large. On s’est attaché à ce que la liste soit jeune, avec une moyenne d’âge de 53 ans. Notre secrétaire général Sylvain Deroeux en a 48, il est formidable et reconnu. On a Marion Kellin (39 ans) qui connaît le rugby territorial comme sa poche, puisqu’elle était directrice du comité Auvergne. Joueuse, dirigeante, arbitre, c’est une passionnée, elle a coché toutes les cases ! Elle connaît les salariés de Marcoussis, qui ont aussi besoin d’apaisement. On a quelqu’un comme Claude Elias, notre trésorier, qui a été un très grand trésorier du Stade Toulousain, et qui est prêt à se donner complètement au rugby. On veut instaurer l’idée d’un tandem, et il aura à ses côtés Mathilde Simonato qui a contribué à redresser le club de Chalon-sur-Saône.

Je veux citer aussi Caroline Cordou, chirurgien, qui a été à l’origine d’une section rugby cancer à Clermont. Le rugby est un enjeu de société, et on veut mettre en avant les valeurs éducatives et citoyennes de ce sport. 

Un président de Fédération doit mettre les bonnes personnes aux bons endroits. Jean-Marc Lhermet est aussi une chance inespérée pour le rugby. Il a prouvé avec Clermont qu’il pouvait construire quelque chose de solide.

Dans cette liste, on retrouve aussi des têtes connues ayant déjà occupé des postes importants dans le rugby français comme Jean-Claude Skrela ou Serge Blanco. Que répondez-vous à ceux qui pourraient penser que c’est un retour vers le passé ?

Je leur répondrais de faire le calcul du nombre d’années passées à la FFR par Alain Doucet, Christian Dullin, Henri Mondino ou Patrick Buisson. Vous allez avoir des gens qui sont là depuis 25/30 ans. Pardon, mais je n’ai pas le sentiment que ce soit un grand renouveau. Je pense qu’il faut changer, apporter quelque chose de nouveau. Sur les 38 colistiers, seuls deux sont des anciens élus des mandatures de Pierre Camou. Et les postes sur lesquels on les a positionnés sont cohérents.

Serge Blanco va travailler sur les partenariats. Sa notoriété, sa gentillesse, son sens du contact feront merveille. Et c’est une chance phénoménale d’avoir un Serge Blanco pour travailler à l’international. Jean-Claude Skrela va travailler sur du rugby à 7 dans les clubs. L’enjeu est phénoménal. On a quand même des Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024, et aujourd’hui le 7 n’existe pratiquement pas dans le paysage des clubs. Personne ne peut me dire que Serge ou Jean-Claude ne sont pas à leur place. 

On est un drôle de pays qui brûle ses idoles. Vous vous rendez compte de ce que représente Serge Blanco ? Quand j’entends des gens l’attaquer, je suis révulsé. Il se met au service du rugby sur deux sujets pour lesquels il est incontestable. Alors bien sûr que j’entends les attaques. Je sais bien comment Bernard Laporte va faire sa campagne, en essayant de cacher la poussière sous le lit, avec une AG financière qui interviendra après coup, des chiffres qu’on ne pourra pas certifier. Probablement des fake news qui vont arriver, puisque c’est la méthode…

Si on se projette dans quelques mois, et que vous êtes élus, quels seront vos premiers chantiers ?

On va bientôt communiquer sur les quinze premières actions, qui seront déterminantes. Notre équipe sera tout de suite opérationnelle, avec des gens ultra-compétents. Il y a urgence à prendre des mesures, qui tournent autour de l’aide aux clubs, aux bénévoles, et de la relance des licenciés. Au-delà de la compétition, il y a une dimension éducative majeure à avoir pour les clubs. On considère que la FFR est une entreprise à mission, au même titre que les Restos du coeur. Je fais volontiers le parallèle, parce qu’ils ont 2000 implantations en France. Nous, on a 1930 clubs : c’est proche. Chaque année, les Restos lèvent 94 millions d’euros par an. Sur la mandature, on aimerait lever 16 millions d’euros pour alimenter les clubs qui font l’effort du développement (travail scolaire, rugby féminin, à 5), de la formation (école d’arbitrage, éducateurs diplômés, cadets/juniors) et du citoyen (travail dans les quartiers prioritaires de villes, accueil d’enfants autistes, section rugby cancer). On veut valoriser ces clubs, plutôt que ceux qui misent tout sur l’équipe première, et peuvent jouer en Fédérale 1 sans avoir de cadets ou de juniors. L’autre chantier sera de relancer le nombre de licenciés en mettant à disposition des clubs un kit “Booster EDR” déjà en place en Île-de-France. On fera également un audit financier et RH de la FFR, et de l’ensemble des Ligues.

Le mot de la fin sur le club de l’ACBB que vous avez présidé. L’équipe remonte en Fédérale 2 après avoir connu l’Honneur il n’y a pas si longtemps…

Je suis très heureux pour eux ! J’ai mon fils qui y joue… Il m’a mis les poils le jour où il m’a téléphoné en me disant : “Papa, je joue au rugby à l’ACBB depuis l’âge de 7 ans, et pour la première fois de ma vie, je vais jouer en équipe première.” J’ai de l’émotion parce que c’est une super équipe, qui a connu un creux en perdant son terrain, qu’elle a finalement obtenu. Le club a tenu bon !

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  • de1a15
    603 points
  • il y a 3 ans

Je ne connais M. Florian Grill que par les médias.
Alors, il n’est pas facile de me faire une opinion précise sur ses compétences.
Par contre, son adversaire, le président sortant, est bien identifié.
Ses décisions impulsives sont incompatibles avec son poste.
Néanmoins, j’accepterai les résultats du vote électronique.
Encore faudrait-il que les résultats publiés soient conformes aux votes exprimés.
Mais comment vérifier un vote électronique ?
• Demander aux électeurs de voter en deux exemplaires :
o Un transmis au vote électronique mis en place par la FFR.
o Un double envoyé à un huissier de justice missionné par une organisation indépendante de la FFR.
o Refuser les votes exprimés en simple exemplaire.
• Rapprocher le résultat du vote électronique de celui de l’huissier de justice.
Il serait souhaitable que M. Florian Grill fasse la demande officielle de ce double vote.

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