Coupe du monde - Guy Novès : ''Je vois bien la France en demi-finale''
Guy Novès commentera France-Argentine depuis les Halles de la Cartoucherie à Toulouse, ce samedi !
Guy Novès nous a accordé un entretien exclusif à quelques jours de France - Argentine. Match qu'il commentera depuis les Halles de la Cartoucherie de Toulouse ce samedi matin.

C'est au téléphone que je m'entretiens avec monsieur Guy Novès. Originaire de Toulouse, je vois Guy Novès comme une statue en ville ou une personne si loin et si proche à la fois. Et c'est de manière très apaisée que celui qui a passé 40 ans au Stade Toulousain me répond depuis une tribune d'un stade proche d'Ernest-Wallon, où il apprécie ces moments simples avec sa petite fille qui s'entraîne : "Bonjour, j'ai votre numéro, mais je ne sais pas à qui j'ai affaire monsieur." Au fil de la discussion, je ressens que rien n'est oublié, rien n'est pardonné, mais que la vie continue et qu'un homme traîné dans la boue peut encore se relever.

Bonjour monsieur Novès, on a déjà dû vous le demander plusieurs fois, mais quel est votre pronostic pour cette Coupe du monde ?

On ne me l'a pas posé la question du pronostic final. Écoutez, je mettrais une pièce sur la Nouvelle-Zélande évidemment qui fait partie des meilleures nations avec l'Angleterre ou l'Afrique du Sud qui a quand même été impressionnante dans le Rugby Championship. L'Angleterre, qui a été catastrophique à la dernière Coupe du monde et qui, je pense s'est préparée en conséquence. Je vois ces trois nations arriver peut être au bout. 

Et la France ?

Ça dépend ce qu'on appelle un beau parcours, parce qu'en France c'est très compliqué. Il n'y a qu'à voir, on craint l'Argentine qui a perdu 9 fois consécutivement et on met la France qui a perdu 2 matchs au pilori. C'est très difficile, mais je vois la France sortir de sa poule, c'est mon point de vue. Effectivement, après, elle va se retrouver dans les phases finales assez rapidement contre l'Angleterre, parce que la Nouvelle-Zélande et l'Afrique du Sud ont un autre parcours. Je vois bien la France arriver en demi-finale.

Le jeu français a-t-il progressé selon vous ?

Progressé, disons qu'il y a quand même des incertitudes dans l'animation du jeu offensif français. La défense aussi paraît en place sauf par moment. Maintenant, l'évaluation s'est faite face à des équipes dîtes "mineures", l'Écosse et l'Italie. C'est intéressant, moralement, d'avoir des repères face à certaines nations. Mais tant qu'on ne joue pas les nations qui sont au-dessus de nous, mais plutôt des nations qui sont en dessous, on ne peut être que satisfaits de que ce qu'on a vu. On a l'impression que la France peut réaliser de très bonnes choses, ce qui est certain d'ailleurs. On a aussi la sensation qu'à des moments, elle peut s'endormir. Alors espérons qu'en Coupe du monde, et j'espère que ce sera le cas pour les joueurs, ils ne s'endorment pas.

Êtes-vous encore en contact avec vos anciens joueurs ?

C'est un peu ma vie, mais passer de 40 ans dans ce milieu du rugby à tout d'un coup ne plus avoir de contacts ce serait un peu compliqué. Mais je suis effectivement en contact avec certains joueurs ! 

Maintenant que vous avez un regard plus lointain sur le rugby, qu’en pensez-vous ?

Le regard lointain je ne l'ai que depuis un an, puisque ça fait à peu près un an qu'on m'a écarté. Après je suis capable de regarder tous les matchs. Ce que j'en pense ? Le rugby est dans une évolution et il y a toujours des équipes motrices pour l'avenir. Cette année au niveau national, c'était le Stade Toulousain qui est revenu à un immense et très agréable niveau. Il n'y a qu'à voir le nombre de joueurs toulousains qui sont aujourd'hui en sélection. Ça démontre bien que les différents staffs ont compris que le rugby de demain passe par d'abord une bonne défense, mais aussi une animation offensive très importante avec des joueurs capables de se déplacer avec de la vitesse et le plus souvent possible. C'est vrai qu'on va vers un rugby spectaculaire. Enfin, du moins, c'est ce que je ressens quand je vois des bons matchs, après il m'arrive évidemment de voir des matchs où toutes les 30 secondes un ballon tombe. Ça c'est toujours le cas, et ça a tendance à nous endormir. Le rugby de demain, le rugby efficace, est basé sur des qualités physiques mais ça c'est pas nouveau. On a qu'à voir de quelle manière les Fidjiens ont corrigé l'équipe de France au Stade de France il y a quelques mois. Mais c'était dans un rugby, encore une fois, fait de prises d'initiatives et dynamique. Il peut paraître insouciant et bien sûr qu'il y a toujours ce petit pêché d'orgueil avec cette relance sous ses poteaux, mais je ne sais pas si c'est ce qui reflète la volonté des joueurs.

Le rugby est-il une femme que vous avez aimé et qui souhaite le divorce ? Ou bien juste un ami de longue date qui vous a déçu ?

Le rugby ne m'a jamais déçu. J'ai passé toute ma vie dans le rugby, même si j'ai été pendant 21 ans professeur d'éducation physique. Que ce soit en terme éducatif ou autre, le rugby est toujours un sport admirable. Il y a, comme dans la vie de tous les jours, des contraintes qui se sont rajoutées et auxquelles il faut s'adapter. Les jeunes ont besoin de repères. Mais le rugby ne m'a jamais déçu, les hommes non plus d'ailleurs. Sauf récemment, avec des gens en qui je n'avais pas confiance et qui n'avaient sûrement pas confiance en moi et qui cherchaient des arguments qu'ils n'ont pas trouvé vu qu'ils ont perdu leur procès, mais qui m'ont quand même écarté. 

Vous n’avez pas peur que votre image ait changé auprès des gens après cette longue bataille juridique ?

Avant d'avoir la finalité du procès, les gens que je rencontrais ont toujours été admirables et adorables. Je suis allé 2 fois au Stadium, les 35 000 personnes scandaient mon nom. Et ça c'était avant le procès. Avant le procès et le résultat positif pour moi, les gens scandaient mon nom au Stadium donc ça n'a absolument rien changé si ce n'est en ce qui me concerne à moi où j'ai évidement retrouvé une partie de ma légitimité et de ma fierté. Quand vous donnez autant sur le terrain, que ce soit en tant que joueur ou entraîneur, c'est vrai que vous avez du mal à admettre qu'on vous écarte du jour au lendemain. À ce moment-là, on établi un petit bilan rapide de ce qu'on a fait et du pourquoi on a été écarté. Puis on regarde son propre parcours, et je vous dis ça avec beaucoup d'humilité, mais 5 titres de champions de France avec le collège de Pibrac, 1 titre de champion de France avec les juniors Reichel dès la première année d'entraînements, 12 fois champion de France avec le Stade Toulousain, 4 fois champion d'Europe et 6 finales, le Béguère, le Du Manoir, la Coupe de France et certaines personnes ont expliqué que je pouvais être incompétent. Donc non, c'est quand même un peu compliqué.

Comment se passe la "convalescence" ?

Choqué je le suis, et je le serai toujours. C'est comme une tâche qui ne part pas. Après, je suis passé à autre chose, je vous parle et je suis dans une tribune où je regarde ma petite-fille faire une séance d'athlétisme parce qu'on est mercredi après-midi. Je suis passé à autre chose, mais je ne peux pas oublier ce que j'ai vécu, et je ne l'oublierai pas d'ailleurs.

Vous serez ce samedi aux Halles de la Cartoucherie de Toulouse pour commenter le France-Argentine, premier match de Coupe du monde, cette voie-là ne vous botte pas ?

Je ne peux pas me permettre de faire en sorte que mes sentiments se ressentent. Après, j'avoue que je vais être supporter de cette équipe de France, celle qui rentre sur le terrain. Et je vais être derrière cette équipe. Mais je ne suis pas, et je ne serais jamais plus derrière cette fédération, tout simplement. Je ne peux pas vous dire que je vibre pour des gens qui dirigent cette fédé. Le plus important, malgré tout, ça reste les joueurs. 

Guy Novès sera présent ce samedi pour le lancement de la Coupe du monde française face à l'Argentine aux Halles de la Cartoucherie de Toulouse. Il commentera le match en compagnie d'un joueur argentin à partir de 8h30. Venez nombreux, c'est par ici !
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"Si j'étais resté aux commandes du XV de France !!!", dit-il d'un air goguenard...

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