Décryptage. Comment la stratégie de jeu au pied de l’UBB a bousculé le Stade Toulousain ?
Matthieu Jalibert et son compère de la charnière Maxime Lucu ont réalisé un match parfait dans leur animation, notamment au pied. Crédit image : Screenshot Youtube : beIN SPORTS France
L’UBB s’est qualifiée pour la première finale de Champions Cup de son histoire de la plus belle des manières face à Toulouse, grâce à un excellent jeu au pied.

L’UBB s’est donc imposé après une magnifique demi-finale contre le Stade Toulousain, un match dans lequel les avants de la Gironde se sont montrés dominants face aux Emmanuel Meafou, Thibault Flament, Julien Marchand, Jack Willis… Une rencontre où la charnière Maxime Lucu / Matthieu Jalibert s’est distinguée par son alternance, sa gestion, notamment au jeu au pied. Bordeaux a parfaitement su occuper le terrain, grâce à un plan de jeu bien précis, adapté aux absences de Thomas Ramos et Blair Kinghorn.

L’option du jeu au pied long

Dès le coup d’envoi de ce match, le ton fut donné par les joueurs bordelais. Un jeu au pied long, au-delà des 22 mètres pour mettre la pression sur les Toulousains dans leur camp, grâce à la vitesse de Louis Bielle-Biarrey qui a pu gêner la réception du porteur de balle, en l’occurrence Jack Willis, qui s’en sort adroitement.

Cette stratégie a fonctionné grâce à la longueur du jeu au pied de la charnière bordelaise Jalibert/Lucu. À l’image de sa pénalité de 60 mètres, le demi de mêlée du XV de France a impressionné avec la puissance de son jeu au pied, que ce soit face aux perches, mais aussi dans le jeu courant. L’ancien Biarrot a multiplié les très longs dégagements, souvent après des phases de rucks, pour permettre à ses avants de souffler et surtout d’enlever une grosse pression sur les épaules de son équipe.

Yannick Bru et son staff ont également fait le choix de ne pas sortir systématiquement les ballons en dehors du terrain pour éviter les contre-attaques toulousaines, une stratégie osée, quand on connaît les qualités de relances des joueurs haut-garonnais présents sur le terrain (Ange Capuozzo, Juan Cruz Mallia, Dimitri Delibes…).  

Ce parti pris peut fonctionner à deux conditions : avoir une défense très rapide et hyper efficace, mais aussi posséder des joueurs avec un jeu au pied plus puissant que les adversaires. Ce fut le cas samedi dernier pour les coéquipiers de Yoram Moefana, qui ont remporté le duel de gagne-terrain sur la globalité des longs échanges de jeu au pied. Principalement grâce aux trois botteurs majeurs de l’UBB : Maxime Lucu, Matthieu Jalibert et Romain Buros. Nul doute que cette tactique des Bordelais prenait en compte l’absence de Thomas Ramos et Blair Kinghorn.

Mais cela n’enlève rien à l'investissement des joueurs de Bordeaux, qui devront rééditer cette performance en finale de Champions Cup. D’autant plus que Northampton s’appuie sur un « kicking game » similaire, avec l’utilisation quasi-systématique d’un long jeu au pied de pression de la charnière internationale Alex Mitchell / Fin Smith. Pour permettre à leurs deux ailiers du XV de la Rose, Tommy Freeman et Ollie Sleightholme, de jouer un duel aérien.

Le sang-froid bordelais

Au-delà de cette tactique de jeu au pied de pression très long, la charnière de l’UBB a parfaitement maitrisé le rythme de cette rencontre. Matthieu Jalibert, et son partenaire Maxime Lucu, ont bien su alterner entre ces dégagements pour repousser le troisième rideau adverse et les chandelles pour permettre à ces ailiers et notamment Louis Bielle-Biarrey de récupérer des ballons dans les airs. Comme le prouve l’essai de Ben Tameifuna, auteur d’une magnifique rentrée, suite à un jeu au pied du demi de mêlée international en fin de rencontre.

Matthieu Jalibert a souvent été critiqué pour son manque de constance au jeu au pied, mais il a su rester lucide tout au long de la partie. Que ce soit pour sortir son équipe de la pression toulousaine, mais aussi sur des détails, comme la pénaltouche de 50 mètres qui conduit à l’essai de Pierre Bochaton, alors que Bordeaux ne menait que de 7 points. Un sang-froid qui a fait la différence, même sur des détails comme la qualité de ses coups d’envois, toujours avec beaucoup de hauteurs pour permettre à ses coéquipiers de contester le ballon dans les airs.

Un point-clé du match, puisque c’est sur le coup d’envoi de la seconde mi-temps, trop long et sans pression, que le Stade Toulousain a encaissé l’essai de Louis Bielle-Biarrey, suite à une formidable chevauchée de l’ailier tricolore, bien aidé par le relais de Pete Samu.

La couverture de Romain Buros

S’il y a bien un joueur indispensable à cette équipe de Bordeaux, c’est Romain Buros. Le natif d’Aire-sur-l’Adour n’est pas l’élément le plus médiatique de la ligne de trois-quarts de l’UBB, pourtant sa présence est primordiale pour le bon fonctionnement de cet effectif.

Contre le Stade Toulousain, il a su déjouer la stratégie des joueurs d’Ugo Mola de multiplier les jeux au pied rasants à l’entrée des 22 mètres bordelais. Romain Buros était toujours très bien positionné, mais il arrivait surtout à se dégager de la pression mise par les Toulousains. Ces derniers le « chassaient » en espérant, à minima, récupérer le ballon proche de cette zone de marque après un mauvais dégagement en touche. Mais ces erreurs n’ont jamais eu lieu, grâce à l’anticipation, la vitesse et la longueur de jeu au pied de l’ancien joueur de la section paloise.

Ce positionnement impeccable et ses qualités le rendent très complémentaire avec ses deux ailiers du XV de France. Damien Penaud possède un profil plus créateur grâce à ses appuis et ses courses déstabilisantes, tout en étant le joueur le plus physique de ce triangle arrière. Louis Bielle-Biarrey est (sûrement) un des joueurs les plus rapides du circuit mondial de rugby à XV, assurant un incroyable rôle de finisseur. Romain Buros permet ainsi d’ajouter un très bon jeu au pied et une superbe vision du jeu à ce redoutable trio.

Le plan de jeu de l’UBB concernant le jeu au pied s’est donc révélé être un choix tactique payant. En s’appuyant sur une occupation importante pour imposer au triangle arrière toulousain de relancer du fond de terrain ou d’engager un jeu de « ping-pong » rugby qui a fini en défaveur des champions de France en titre. D’autant plus que les absences de Thomas Ramos et Blair Kinghorn ont obligé Ugo Mola de titulariser des joueurs plus réputés pour leurs qualités de relance que leur jeu au pied. Bordeaux devra évidemment renouveler cette performance pour décrocher le premier titre européen de son histoire. Une finale face à Northampton particulière, entre deux équipes qui possèdent un système de jeu et des profils de joueurs plutôt similaires.

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Oui, grâce à leur pack, L'ubb a bien tenu le choc, malgré quelques difficultés en mêlée. Mais "Big Ben" a rapidement rectifié le tir. Par contre, dans les rucks, les Toulousains se sont tout simplement fait manger, avec des ballons systématiquement ralentis. Résultat : Toulouse a été incapable de mettre de la vitesse dans son jeu.

Dans ces conditions, la charnière de L'ubb a pris le dessus sans contestation. Lucu a plaqué comme un fou, a éjecté vite et juste, tout en jouant parfaitement autour des rucks. Il a aussi su soulager son équipe avec de longs dégagements au pied.
Son compère Jaja, lui, a illuminé le match : précis au pied dans tous les angles, avec sa spéciale (le petit par-dessus) mais il a aussi su flairer de superbes coups en attaquant la ligne balle en main, notamment lorsqu’il recevait le ballon à plat devant la défense.

Cette pression constante, ce jeu au pied varié mené à deux, a littéralement éteint la charnière toulousaine. Incapables de proposer des prises d’initiatives ou des éclairs, ils n’ont tout simplement pas su répondre. Romain dort depuis plusieurs matchs, et Graou peine à soutenir la comparaison. C’était à lui de se libérer de ça (il en a été incapable sur ce match).

Et comme derrière, à Lubb, ça va très vite, et que ça combine bien au centre (où le duel a été un peu plus équilibré), ça a fini par faire mouche. Toulouse, lui, n’a jamais réellement existé. Toujours en train de courir après le score…

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