12 semaines pour une ''fourchette'' : juste ou sévère ? Où se situe Etzebeth dans les sanctions les plus dures de l’histoire
Fourchette : ce que dit vraiment le règlement, et pourquoi Etzebeth est tombé pile dans la case. Crédit image : Screenshot
World Rugby sévit : 12 semaines pour Etzebeth après un doigt dans l’œil à Cardiff. Un geste aussi stupide que coûteux. Une sanction légère ou juste ?

La tournée d’automne des Springboks devait se conclure sur une note parfaite. Elle l’a été… ou presque. Samedi, à Cardiff, l’Afrique du Sud a marché sur le pays de Galles (0-73), mais la fin de match a été ternie par un geste totalement insensé d’Eben Etzebeth. À la 79e minute, lors d’une échauffourée, le deuxième-ligne sud-africain a enfoncé son pouce dans l’œil d’Alex Mann. Le TMO n’a mis que quelques secondes à recommander un carton rouge, et l’affaire a immédiatement été citée devant la commission de discipline.

Jeudi, World Rugby a tranché : 12 semaines de suspension. Le panel disciplinaire avait fixé le niveau “mid-range” à 18 semaines compte tenu de la volonté du geste, mais la commission a accordé les circonstances atténuantes classiques (reconnaissance des faits, excuses, casier propre), ramenant la sanction à douze semaines. Elle s’appliquera sur 12 rencontres des Sharks (URC + Champions Cup) et court jusqu’au 27 mars 2026 inclus.

Pourquoi World Rugby punit si sévèrement la “fourchette” ?

Pour bien comprendre la sanction, il faut repartir du barème disciplinaire. Contrairement à l’usage courant, World Rugby ne parle pas de “fourchette” mais de trois catégories distinctes :

  • Contact with the eyes (œil directement)
  • Reckless contact with the eyes (contact imprudent)
  • Contact with the eye area (zone oculaire)

Dans le cas d’Etzebeth, aucune ambiguïté : les images montrent un acte volontaire, la commission utilise d’ailleurs le terme “intentional eye-gouging”. Or dans les textes, le contact intentionnel avec les yeux démarre immédiatement à :

  • 12 semaines (bas de fourchette)
  • 18 semaines (mid-range)
  • 24 semaines ou plus (haut)
  • Avec un maximum théorique de 3 à 4 ans de suspension

Etzebeth a donc eu le traitement standard : on part du mid-range (18) pour atterrir à 12 grâce aux atténuants habituels. Ce n’est ni un geste minimisé, ni un geste sur-sanctionné : c’est l’application stricte du règlement.

Où se situe Etzebeth dans l’échelle des sanctions pour fourchette ?

Face à la réaction vive sur les réseaux, beaucoup estiment la sanction “énorme” ou à l'inverse, pas assez sévère. Elle est lourde, certes. Mais historiquement, elle est plutôt dans la moyenne supérieure… et loin des cas les plus sévères du rugby moderne.

Depuis 2000, les gestes similaires ont donné :

  • 3 à 6 semaines pour des gestes imprudents, qualifiés “eye area” sans intention (Bismarck du Plessis : 3 semaines ; Kockott : 3 semaines).
  • 9 à 15 semaines pour les cas sérieux ou avérés sans volonté manifeste (Ghiraldini : 15 semaines ; Bergamasco : 13 ; Cueto : 9).
  • 18 à 26 semaines pour les fourchettes intentionnelles (Hartley : 26 ; Tincu : 18 ; Neil Best : 18).
  • Cas extrêmes → David Attoub : 70 semaines, record absolu.

La suspension d’Etzebeth (12 semaines) se situe au milieu du spectre, équivalente à celles infligées à Shane Jennings, Alan Quinlan ou encore Leguizamón (≈ 11–12 semaines). Ce n’est donc pas un traitement exceptionnel, mais la continuité d’une jurisprudence très stricte autour d’un geste considéré comme l’un des plus dangereux du rugby.

Cette sanction envoie un message clair : la zone des yeux est sacrée. Au même titre que les charges à la tête, World Rugby continue de verrouiller les zones les plus sensibles du corps humain. Et les instances veulent que les joueurs comprennent : peu importe le contexte, la tension ou la bagarre… toucher aux yeux, c’est minimum 12 semaines.

Qui paie la facture ? 

Ce sont les Sharks qui sont les principaux impactés : Etzebeth manquera 12 matchs, soit une large portion d’URC et de Champions Cup. Pour rappel, la franchise sud-africaine affronte le Stade Toulousain ce dimanche dans le cadre de la première journée de la coupe des champions. Dans une équipe où il est non seulement un cadre mais un leader, l’impact est énorme, particulièrement en conquête et dans le combat au sol.

La sanction ne couvre pas la fenêtre internationale. Etzebeth restera éloigné des terrains pendant presque quatre mois, ce qui compromet sa préparation physique. Mais on l'imagine mal se tourner les pouces en attendant. Et un retour en avril sur le pré lui laisse suffisamment de temps pour reprendre en vue des matchs des Springboks lors de l'édition inaugurale de la Nations Cup. Les champions du monde accueilleront l'Angleterre, l'Ecosse et le Pays de Galles en juillet 2026.

Cette décision confirme ce qu’on voit depuis vingt ans : la fourchette reste l’un des gestes les plus sévèrement punis du rugby. Le cadre disciplinaire est clair, la jurisprudence lourde, et World Rugby n’a plus aucune patience pour les zones à risque. Pour Etzebeth et les Sharks, la note est salée. Mais pour le rugby, le message est cohérent : protéger l’intégrité des joueurs n’est pas négociable.

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D'après les supporters sud africain, c'est trop...et si tu leur rappelles les sanctions du passé pour d'autres joueurs , ils te rient au nez.
On sent avec ce verdict qu'il y a eu négociation(s), car s'il y avait eu une "logique", Etzebeth aurait fini sa carrière.
Mais vu les images, c'est quand même un énorme camouflet que cette sanction, et ça ne renvoie pas du tout une bonne image de notre sport.

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