Que faut-il retenir du Rugby X, cette nouvelle forme de jeu lancée par World Rugby ?
Au Rugby X, en cas d'égalité, les rencontres se dénouent par du 1vs1.
Le Rugby X, ce nouveau format de rugby à 5 avec contact, a vu le jour ce mardi à Londres. Nous y avons jeté un coup d'oeil.

Et si le Rugby X était tout simplement l'avenir de notre sport ? À l'heure d'un rugby qui interroge en raison de ses affrontements toujours plus violents et de ses accidents à répétition, la mise en place d'un rugby plus simple, à 5, tout en gardant l'aspect contact entre les joueurs, pourrait s'avérer comme une piste à développer très sérieusement. World Rugby a ainsi lancé ce mardi 29 octobre à l' Arena de Londres, le premier tournoi international concernant cette discipline. Six équipes masculines ont été conviées (Angleterre, France, Argentine, USA, Irlande et Barbarians) ainsi que quatre équipes féminines (Angleterre, France, Irlande, USA). Les acteurs ? Les joueurs et joueuses du circuit mondial à 7 qui préparent leur saison, et même certaines ex-stars de la discipline.

Passionnés de rugby et surtout curieux, nous n'avons pu nous empêcher de jeter un coup d'oeil à cet événement. Séance de rattrapage donc pour ceux qui n'auraient pas à eu la chance d'apercevoir quelques matchs et surtout, décryptage de ce rugby qui nous a laissé quelque peu... perplexe.

Un rugby plus simple à comprendre

Les règles du Rugby X (bien qu'elles soient encore à améliorer), sont faciles. Ici, pas de transformation, ni de touche. Le jeu s'enchaîne et toutes les pénalités sont jouées rapidement à la main. Si un ballon sort des limites du terrain, des joueurs présents sur les côtés peuvent remettre en jeu ce dernier par la passe, pour l'équipe qui en obtient la possession bien évidemment. Sur un en-avant, si l'avantage ne profite pas, l'arbitre ordonne (comme à 7), une mêlée à 3. Même si ici, elle n'est pas poussée. Une situation originale, que nous détaillons plus bas. Pour le reste, voici les principales règles :

  • la partie ne dure que dix minutes, sans mi-temps
  • les changements sont illimités
  • pas plus de deux joueurs dans un ruck
  • pas plus de trois joueurs dans un maul
  • les cartons jaunes durent jusqu'au prochain essai
  • en cas d'égalité le match se joue en un contre un, selon la même règle que les tirs aux buts (si l'équipe A marque, l'équipe B doit marquer derrière sinon elle est éliminée). Le joueur a alors à chaque fois dix secondes pour marquer. Il est placé à 30 mètres de la ligne d'en-but et le défenseur à 5 mètres de celle-ci lors de la situation initiale.

C'est notamment de cette façon que les Anglaises ont remporté le tournoi face aux Américaines :


Au-delà de l'aspect compétition professionnelle, cette nouvelle forme de rugby est alors très intéressante selon deux points :

I/ Développer un rugby de formation

Le Rugby X pourrait devenir tout simplement la première forme de rugby à plaquer à développer dans les clubs. Un jeu beaucoup plus simple à comprendre pour les jeunes, qui de plus leur permettrait de jouer en continuité. Avec moins de joueurs sur le terrain, cela favoriserait également l'intégration d'un joueur dans le jeu, là où certains débutants peuvent parfois se cacher dans un rugby à 10, ou à 12, par timidité.

II/ Une facilité de compréhension pour le grand public

On ne va pas se le cacher, le rugby est un sport compliqué. Que ça soit pour les pratiquants dans un premier temps, qui pour la quasi-totalité ne connaissent pas les règles sur le bout des doigts, mais surtout pour le grand public, qui lorsqu'il s'intéresse au rugby, ne comprend strictement rien au jeu. Ici, fini les questionnements interminables de votre famille pendant les matchs. En regardant seulement une rencontre, on comprend très rapidement de quoi il s'agit. Les règles étant plus simples et les phases de jeu bien moins complexes.

Un jeu toujours plus porté vers la vitesse et le mouvement

Si le rugby à 7 est aujourd'hui déjà un vecteur de formation dans ce domaine, à l'image de stars internationales du XV aujourd'hui comme Cheslin Kolbe ou Rieko Ioane, qui ont explosé dans cette discipline, le Rugby X pourrait l'être davantage. La stratégie est simple dans ce style de rugby, bouger le ballon le plus rapidement possible, selon différentes techniques (croisées, redoublées, etc...), pour se créer des situations de surnombres et des espaces, et par la suite, franchir. C'est exactement ce qu'ont réussi à faire de manière générale les équipes féminines, notamment les Françaises, qui ont multiplié ces séquences de jeu, en jouant debout quasiment systématiquement. Lors du match pour la troisième place, elles ont étouffé les Irlandaises en leur faisant tourner la tête avec cette technique. À force de courir derrière le ballon, ces dernières ont craqué défensivement et ont loupé un certain nombre de plaquages qui ont permis aux Françaises de l'emporter assez aisément.

Chez les garçons, cette adaptation a eu plus de mal à se faire. Beaucoup trop d'équipes ont encore été trop souvent à la recherche du défi physique pour resserrer des joueurs avant d'écarter le ballon. À l'image des Américains qui ont utilisé à de nombreuses reprises la puissance de Danny Barrett, car sur un terrain plus réduit, ils n'arrivaient pas à faire la différence comme à 7 avec Carlin Isles et Perry Baker. Mais ici, cela ne marche peu ou quasiment pas. La vitesse de passe et le jeu dans les espaces sont les maîtres-mots. 

Résultat : on a plus l'impression d'assister à un match de handball ou de basket qu'à un match de rugby, tant les actions et les points s'enchaînent (moyenne de dix essais par match). Et ça n'est pas pour nous déplaire !

Une qualité sur les 1vs1 irréprochable 

Si l'aspect collectif et la capacité à faire bouger le ballon en un temps record sont les caractéristiques essentielles de cette discipline, la qualité individuelle du joueur est également particulièrement importante. Notamment en défense ou le fameux « un plaquage manqué = un essai » est démultiplié ici ! Sur le côté offensif, les « steppers », comme à 7, sont très avantagés. Là où les sprinteurs, qui ont souvent l'habitude de déborder à 7, se retrouvent plus dans la difficulté, le terrain étant plus réduit (55 mètres de longueur et 25 de largeur). Les offloads sont également une arme de destruction massive ici, et on imagine déjà que c'est un jeu qui devrait convenir de plus en plus aux Fidjiens. 

Une pratique encore à développer...

Si cette première approche de la discipline semble plutôt satisfaisante pour les amateurs de jeu et de mouvement, elle nous laisse néanmoins perplexes sur un grand nombre de points.

La mêlée

Cette phase de jeu qui a fait l'histoire et le succès du rugby a été conservée dans le Rugby X. Mais ici, elle s'avère quasiment inutile, dans la mesure où le relayeur se retrouve en 2vs2 avec son partenaire. La mêlée étant formée par trois joueurs. Ce qui veut dire qu'à haut-niveau, avec les qualités offensives que possèdent les joueurs de 7, c'est quasiment essai à chaque fois pour les attaquants. Ce qui ne laisse pas trop de suspens. Une remise en jeu à la main, comme pour la touche ou sur pénalité, serait sûrement bien plus intéressante.

Le souci du détail

La dernière action de la demi-finale entre la France et l'Argentine en est l'exemple parfait. Comme nous l'avons expliqué plus haut, deux joueurs de chaque équipe sont placés de part et d'autre des lignes de touche et peuvent relancer le jeu à tout moment si le ballon sort. Ils peuvent également remplacer un joueur quand ils le souhaitent, car les changements sont illimités. Lors du match France-Argentine, alors que nous jouons au-delà du temps réglementaire et que les deux équipes se retrouvent à égalité, l'arbitre ordonne une pénalité pour les Pumas. Au même moment, les Argentins tapent en touche, pensant le match terminé, mais l'arbitre revient à la pénalité celle-ci n'ayant pas été jouée selon lui. 

L'Argentin présent sur la touche avec un ballon saisit alors cette occasion pour rentrer sur le terrain et jouer vite cette pénalité, alors que les Français ne s'étaient pas replacés. Résultat, sans défense face à lui, il finit dans l'en-but et l'Argentine remporte le match. Seulement voilà, dans l'euphorie, aucun de ses coéquipiers n'est sorti et les Argentins se sont retrouvés à 6 sur le terrain. En avaient-ils le droit ? L'arbitre n'est en aucun cas revenu sur ce point lors de sa déclaration d'après-match. Preuve que cette discipline est encore en chantier. Pas de bol, cela a coûté la finale à nos Français. 

Les Pumas ont par la suite remporté le titre face à l'Angleterre :


Un rugby encore moins fait pour les avants

Des joueurs rapides, capables d'esquiver et d'être habiles techniquement. C'est ce que demande le Rugby X. Désolé, messieurs les avants, vous serez peu à avoir vos chances. Excepté peut-être Sekou Macalou.

Un format qui va faire parler

À l'image du rugby à 7, on entend déjà venir les fervents défenseurs du XV argumenter que cette discipline ressemble à tout sauf à du rugby... Même si les participants ne doivent pas être du même avis. Dans tous les cas, c'est un rugby qui va alimenter de nombreux débats. Malgré tout, ce nouveau format a semble-t-il déjà trouvé ses supporters de l'autre côté de la Manche, la ferveur ayant été au rendez-vous, aux dires des joueurs et joueuses.

Puisqu'on en parle des participants, on leur a demandé leurs réactions ! Voici donc celles de Joanna Grisez (France 7 Féminines) et de Stephen Parez (France 7) :

Joanna Grisez :

Le Rugby X est un jeu qui nous correspond bien. Passer dans le dos, mettre des raffuts, lever le ballon après-contact, rentrer dans les couloirs. C'est quelque chose que l'on aime faire et on prend plaisir à y jouer. Alors que des équipes comme l'Irlande par exemple, sont plus sur du jeu à une passe. Nous, on préfère jouer debout et c'est la philosophie du 7, et désormais du rugby à 5. Maintenant, ce qui est frustrant pour les joueuses, c'est qu''elles ne jouent pas beaucoup. Il y a cinq joueuses sur le terrain et 7 en dehors, donc ça tourne énormément, c'est compliqué d'installer des choses, tout se fait très vite. Sur le terrain, en revanche, c'est plaisant, car nous avons beaucoup de duels à jouer. Il y a beaucoup moins de stratégie, c'est plus du 1vs1. Pour moi, je trouve que c'est plus simple d'avoir un bon gabarit ici, car si quelqu'un a beaucoup d'appuis, mais qu'il n'a pas un très gros gabarit, il se fait refouler en général dans un espace aussi petit. Je pense que cette discipline peut vraiment avoir de l'avenir. Nous avons beaucoup appris de cette expérience, notamment pour le 7, car il y a beaucoup de similitudes. 

 
Stephen Parez : 

Le Rugby X est un tout nouveau type de rugby, beaucoup plus dynamique que n’importe quelle forme de rugby déjà existante. Tout est fait pour retrouver le rugby que l’on aime, à l’image du Stade Toulousain de la saison dernière en Top 14 ou du Japon lors de cette Coupe du monde 2019. Un ballon qui vit, des duels de partout, des caramels et de beaux gestes techniques. C’est un vrai show à l’américaine, on se croirait sur un parquet de NBA ! Des lumières dans tous les sens, de la musique ! Il faut dire qu'ici, on n'est plus dans le rugby traditionnel dans lequel nous avons grandi, mais dans un sport de spectacle, de show. Alors pourquoi le rugby ne se trouverait pas une place dans ce style d'événement ? 

Bien sûr tout ça a un impact sur les joueurs, l’excitation est à son comble et comme si tous les artifices mis en scène n’étaient pas suffisants, ils (World Rugby) ont inventé le one on one ! Un show dans le show... En cas de match nul, le one on one « s’active ». Cela se passe en un contre un sur tout le terrain. La tension est à son comble et la salle retient son souffle jusqu’à la fin du duel. Je dirais donc que ce Rugby X est plus qu’excitant et très envoûtant. On ne savait pas trop à quoi s’attendre à vrai dire, mais ce fut une très belle découverte. Cependant, il reste encore quelques petits réglages à régler, mais cette nouvelle formule promet. 

En ce qui concerne le jeu en lui-même, durant le championnat il y a beaucoup de stratégies. Là les équipes ne sont pas forcément préparées pour cet événement, du coup c’était plus simple de jouer. Mais je pense qu’avec de l’expérience, ce jeu deviendra plus complexe. En revanche, les efforts sont beaucoup moins durs qu'au 7, car il y a 7 joueurs sur le banc de touche, ce qui permet de tourner facilement entre nous.

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L'intérêt du rugby, pour moi en tout cas, c'est la complexité du jeu. Déjà le 7 ça m'ennuie mais si c'est pour voir un truc ou ça marque au 2 minutes autant regarder du Basket.

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