PROVALE - Laurent Baluc-Rittener : ''C'était un combat de David contre Goliath, mais je me suis fait voler''
Laurent Balluc-Rittener s'est exprimé sur l'après-éléction.
Laurent Baluc-Rittener est le candidat sortant de l'élection à la présidence de Provale. Défait face à Robins Tchale-Watchou, il a encore des choses à dire.

Laurent-Baluc Rittener, ancien joueur de Bourgoin et d'Albi, s'est présenté à l'élection de la présidence de Provale après avoir passé 4 années dans le comité directeur du syndicat. Après 6 mois d'une campagne agitée, il a été défait de peu (35 votes contre 30) face à Robins Tchale-Watchou, président réélu. Nous avons souhaité donner la parole à Laurent Balluc-Rittener sur ces derniers temps et son futur. 

Tu t'es présenté à l'élection Provale, pourquoi ?

Ça faisait 4 ans que j'étais au comité directeur de Provale et je vis à Toulouse, très près des bureaux, donc je pouvais à la fois m'investir en tant que membre du bureau et voir un petit peu comment fonctionnait cette institution de l'intérieur. Et j'avais beaucoup de retour de la part des personnes proches de cette institution. Je me suis fait ma propre idée et je voyais qu'il y avait quand même des dysfonctionnements. Je n'ai pas plus "gratté" que ça, et puis il y a 6 mois, j'ai été sollicité parce qu'il semblait évident que d'une manière ou d'une autre, il fallait mettre un petit peu de vie et d'élan dans ce syndicat. On m'a donc sollicité pour créer une deuxième liste par des personnes très proche de l'institution qui voyaient qu'elle allait droit dans le mur.

Je ne m'attendais pas du tout à un tel combat politique ! Je trouvais qu'il fallait remettre le joueur et la joueuse au centre des débats, remettre de la proximité entre le syndicat et les joueurs/joueuses. Au final, j'ai passé 90% de mon temps à me battre pour valider ma candidature. Ça a toujours été un combat politique et juridique, mais je le déplore. 

Quelles difficultés as-tu rencontrées ?

Disons que l'institution ronronnait et ne fonctionnait qu'à travers quelques personnes seulement. Ce sont 2-3 personnes qui décident de ce qu'elle doit être pour l'ensemble. C'est une chose qui me paraissait injuste, voire méprisant. J'ai donc voulu tout simplement me présenter en amenant un autre discours, ce qui est la moindre des choses en démocratie. Cette institution n'appartient à personne et on a tout fait pour invalider ma candidature. L'élection a donc été repoussée. J'ai entendu dire que c'était mieux, pour que l'on puisse préparer notre campagne. Mais ce n'était pas du tout ça, je l'ai contraint tout simplement. Ensuite, on a tout fait pour changer les modalités d'élections, que seuls certains puissent décider de l'avenir. J'ai donc dû me battre contre ça. Je trouvais ça dommage, car à la sortie, ça ne fait pas avancer la cause des personnes pour lesquelles on est censé se battre.

On a tout fait pour m'acheter, acheter mon silence. Je n'ai pas voulu rentrer dans la compromission, j'ai refusé.

Tu avais un programme différent de Robins Tchale-Watchou ?

J'avais tout simplement un programme et son jeu n'a été que de casser mes propositions à l'élection en disant que c'était impossible, alors que ça ne l'est pas ! C'est sa parole contre la mienne, c'est ce qui est terrible. Moi j'avais un programme basé sur des axes forts.

L'axe de la santé, qui a été complètement mis de côté depuis le dernier mandat, alors qu'il y a toujours une commission. Aujourd'hui, la seule commission est celle gérée par la Ligue, l'observatoire médical, dans lequel aucun joueurs/joueuses ne siège ! Donc l'idée était d'avoir notre propre commission médicale indépendante et j'avais déjà 7 ou 8 participants comme des anciens joueurs/joueuses, des médecins, des kinés, des préparateurs mentaux et physique, etc.

Le deuxième point était l'axe de la formation/reconversion avec une volonté de proposition pour les joueurs issus de centre de formation qui se retrouvent de 70 à 80% d'entre eux sans contrat. Et pour tout ce qui est de la reconversion, proposer des plateformes digitales mettant en relation les joueurs désireux de préparer leur reconversion et les entreprises.

Le troisième axe fort est le rugby féminin, avec notamment Manon André qui aurait été salariée de Provale un jour par semaine pour le rugby féminin, car on estime que c'est une locomotive du rugby français. Se pencher dessus et ne pas rééditer les mêmes erreurs. Tout est à créer dans le rugby féminin au niveau santé, statut de la joueuse, etc. Financièrement, le rugby féminin n'existe qu'à travers la FFR. 

On l'a vu lors de mon élection, où 20 ou 30 filles sont arrivées et ont été fortement sollicitées par la partie adverse car elles ont des contrats fédéraux et qu'on leur a bien fait comprendre qu'il fallait voter pour l'autre camp. (Dans les colonnes de L'Équipe, Robins Tchale-Watchou a réfuté cette information, expliquant que sur les 20 filles présentes, leurs votes étaient partagés entre les deux candidats)

Comment s'est passée l'élection ? 

Dès le départ, j'ai voulu prendre la parole sur les modalités d'élections qui étaient à l'ordre du jour, pour expliquer pourquoi nous étions contre, mais ce sont les salariés qui m'ont coupé la parole en me répondant que nous n'étions pas là pour discuter, mais pour voter. J'ai remarqué que nous étions en Assemblée Générale, mais que c'était les salariés qui décidaient de l'avenir de Provale. Je n'ai pas peur de le dire, c'est une République Bananière. C'est affligeant que les joueurs soient représentés par ça. 80 personnes peuvent en attester, à chaque prise de parole, on me la coupait. C'était un guet-apens. Quand j'ai voulu présenter mon programme que nous avions travailler depuis des mois autour d'un Powerpoint, on m'a signalé que ma présentation devait durer 5 minutes. 

Par exemple, il y a trois joueurs à qui on a dit de monter avec un billet d'avion, mais qui n'ont pas été prévenus qu'ils n'étaient pas à jour de leurs adhésions. Quand on sait que ça s'est joué à 5 votes, il y en a 3 qui n'ont pas pû voter et qui sont rester devant l'entrée. Ces trois-là étaient pour moi dont Paul Abadie d'Agen, Jamie Currie de Massy où un vote interne avait été fait en ma faveur, et IlikenBolakoro avec qui j'ai joué et avec qui nous allions travailler pour les joueurs îliens.

Tu avais des propositions face aux derniers événements tragiques dans le rugby français ?

Bien sûr ! C'était mon cheval de bataille, on ne peut pas transiger avec l'intégrité physique et mentale des joueurs et joueuses. Aujourd'hui, je le répète, il y a un observatoire médical qui est mis en place par la Ligue et par la FFR dans lequel il n'y a aucun joueur présent. Provale n'y est pas représenté non plus. Que pensent ces joueurs de ça ? Que pensent les joueurs des protocoles commotions ? Est-ce que les joueurs qui ont peur, qui s'entraînent, qui font des KO, sont concertés ? Non. Il y a Robins Tchale-Watchou qui monte discuter avec la ministre des sports et Bernard Laporte. Est-ce que Robins Tchale-Watchou est encore joueur ? Il faut faire des réfendums, savoir ce que veulent les joueurs et faire la différence entre les joueurs de Fédéral des pros et des amateurs. Tout ça me paraît évident et ça me crève le cœur de me dire que le rugby va continuer comme ça. 

C'était un combat David contre Goliath, mais je me suis fait voler. À la loyale, je gagne. Jusqu'à la dernière minute, je savais qu'il n'y aurait pas 1% de loyauté venant de sa part. Je n'ai pas peur de le dire.

Robins Tchale-Watchou a déclaré à L'Équipe qu'il se battait "contre des gens qui avaient des intentions inavouables". Qu'a-t-il voulu dire ?

Il faudra lui demander, honnêtement je n'en sais rien. Ce n'est pas moi qui ai fait en sorte que 20 filles du rugby à 7 soient présentes le jour de l'éléction. Il nous parle d'un système de grands électeurs, ce qui éviterait que 20 joueurs d'un club viennent, ce que je trouve très bien ! Mais il fait ça un 7 janvier, jour de reprise de Pro D2 et d'entraînement. Alors que la grande majorité de la Pro D2 me suivait dans cette démarche, mais on se retrouve avec 20 filles du rugby à 7. Je ne suis instrumentalisé par personne, cela fait 4 ans que je suis là, je n'ai pas été parachuté. Nous sommes deux au Comité Directeur, avec Olivier Caisso, à voir comment ça fonctionnait, et 90% de son Comité Directeur a abandonné. Personne ne demande pourquoi son vice-président, Antoine Battut, a arrêté. Comme Olivier Caisso, David Attoub, Alex Ricaud, Mates Clerkin, Pierre Rabadan, Tom Ecochard et moi. Personne ne lui demande rien, mais j'ai l'habitude, ça fait six mois que je suis tout seul à montrer du doigt tout ces dysfonctionnements, toutes ces irrégularités. 

Comment est-ce possible de siéger au comité directeur de la Ligue, être représentant de Provale et chez Vivendi, la maison mère de Canal. Il peut dire qu'il ne mélange pas les choses, mais c'est complètement impossible. Le comité d'éthique l'a d'ailleurs retoqué.

L'aventure se termine aujourd'hui pour toi ?

Je ne sais pas. J'ai rencontré beaucoup de soutiens, beaucoup plus que je ne l'aurais imaginé. C'était une belle aventure humaine, très enrichissante. On progresse et on apprend énormément dans ce genre de démarche et de défi. Maintenant, j'ai envie de reprendre ma vie normale après les 6 mois pesant que je viens de passer. Je me suis battu tout seul face à une institution, pour les joueurs à qui on ne demande même pas leur avis. C'était un combat de David contre Goliath, mais pas à la loyale. Je n'ai pas besoin de Provale pour vivre, de toute manière, j'aurais pris 30% de son salaire actuel (de Robins Tchale-Watchou, président actuel de l'asso). Je suis persuadé qu'il y a la place pour faire quelque chose avec plus de proximité, plus d'échanges ! Encore faut-il que les joueurs en aient réellement besoin... Ils n'y croient plus et sont déçus, il y a 50% d'adhérents en moins alors que Provale s'est ouvert à la Fédérale et au rugby féminin.

Quand on se rend compte qu'on a des coups de téléphones intimidant en disant qu'on a rien à faire là, et qu'on fait tout pour faire en sorte que tu ne sois pas là. 

Pourquoi ne pas créer ton propre syndicat ?

Il y a beaucoup de personnes qui m'en parlent. Créer un syndicat tout seul, c'est beaucoup de travail et d'investissements. Je suis face à une machine de 1 400 000 €  avec 500 000 € de la FFR, 700 000 € de la Ligue, 13 employés, des bureaux à Toulouse et une ancienneté de 20 ans. S'il y a la place et que les joueurs sont demandeurs d'un autre syndicat, pourquoi pas ? Nous ne sommes que deux jours après l'élection, il me faut un peu de temps pour y réfléchir.

À ce jour, Robins Tchale-Watchou, actuel président de Provale, n'a toujours pas répondu à nos sollicitations. Nous sommes ouvert à une interview future.
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  • AKA
    74820 points
  • il y a 5 ans

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