SINGAPOUR : voyage au cœur du rugby local avec le Français Pierre Dayde
Pierre Dayde vit son rêve du côté de Singapour.
Le Rugbynistère est allé à la rencontre de Pierre Dayde, un Français parti s'exiler dans la « ville-jardin ».

Le Rugbynistère des Affaires Étrangères reprend du service en cette période printanière. Direction Singapour à la rencontre de Pierre Dayde, un Toulousain d'origine tombé amoureux de la cité-état. Installé depuis deux ans là-bas, il nous raconte son expérience.

Pierre, peux-tu nous en dire plus sur ton parcours ?

Je suis de Toulouse et j'ai commencé à l'époque au TOEC (Toulouse Olympique Employés Club) quand j'avais 6 ans. Aujourd'hui, ce club est devenu le FCTT (fusion du TOEC avec le Football Club Toulouse et le Toulouse Olympique Aérospatiale Club en 2000) et évolue en Fédérale 2. J'ai joué au FCTT jusqu'en Balandrade. Cette année-là, on finit champions des Pyrénées face à nos grands rivaux de Balma. Je suis ensuite parti à Colomiers où j'ai joué 4 saisons. J'ai fait un an de Crabos où j'ai été surclassé en Reichel et ensuite, j'ai évolué deux ans en Reichel et une année en Espoirs. Cette saison-là, nous avons été en finale avec Colomiers et nous avons perdu face à Auch. À l'époque, il y avait deux poules et nous étions dans la poule 2. Je suis ensuite retourné au FCTT où j'ai joué en Fédérale 3 et juste avant de partir à Singapour, j'ai connu la montée en Fédérale 2.

Comment as-tu atterri dans ce pays où le rugby n'est pas vraiment le sport phare ?

Ma conjointe avait une opportunité là-bas. On travaillait tous les deux à Toulouse, mais on ne voulait pas rentrer dans la routine toulousaine, alors on s'est dit qu'on allait tenter notre chance à Singapour. Il se trouvait notamment que moi, j'étais déjà allé là-bas car mon frère était sur place. Dès que j'ai su qu'on avait comme possibilité de partir à Singapour, je n'ai pas hésité ! Car c'est vraiment une superbe ville ! Et puis, ça joue tout de même au rugby là-bas ! (rires)

Il paraît... Justement, comment ce sport s'organise-t-il dans cette région ?

À Singapour, historiquement, il y avait deux divisions. Une division avec quatre équipes : les Wanderers (formation composée majoritairement d'Australiens), les Bucks (essentiellement des Britanniques), le SCC (Singapore Cricket Club, qui rassemble l'élite de Singapour à savoir des Néo-Zélandais, des Anglais mais aussi des Singapouriens) et les Bedok (historiquement le club des locaux, qui est rattaché à une école). Elles font partie de la Ligue Nationale depuis le début. Ensuite, il y avait un deuxième championnat qui rassemblait quatre équipes représentant les réserves des formations de la première division, mais aussi d'autres clubs, dont nous, le XV Gaulois.

Le XV Gaulois au grand complet.

Comment est apparu ce club ?

Nous sommes une équipe à consonance très française, mais nous nous ouvrons de plus en plus aux locaux et aux autres. En 2009, les Français qui jouaient dans les équipes anglophones de Singapour se sont dits qu'ils allaient créer une association pour faire des tournées dans un premier temps. Car il y a beaucoup de rugby à X dans l'Asie du Sud-est. Finalement, ça a attiré beaucoup de Français, surtout des jeunes qui étaient en stage ou de manière temporaire sur le territoire. Finalement, une équipe s'est montée, mais elle était très dépendante de ces jeunes stagiaires. De ce fait dans les années 2010 et jusqu'à 2013-2014, il y avait beaucoup de joueurs, mais ensuite, il y a eu une grosse baisse de recrues. Au final, le XV Gaulois ne pouvait plus inscrire d'équipe en championnat. Il était devenu uniquement un club social. Une tournée était toujours effectuée au mois de juin pendant la période estivale, notamment pour faire des actions humanitaires au Cambodge, au Viêtnam ou aux Philippines. C'est encore le cas aujourd'hui, on fait souvent un match et on apporte des crampons ou des vêtements aux clubs locaux. Quand je suis arrivé, il y a deux ans à Singapour et qu'il n'y avait plus d'équipes en championnat, je suis allé voir le président historique du club (Jean-Cyrille du Roizel) qui est là depuis 2009, pour lui dire qu'il faudrait relancer une équipe. On a ensuite recruté les différents Français qui jouaient dans les clubs de Singapour et on a réussi à remettre une équipe en championnat pour la saison 2017-2018. Nous avons évolué en deuxième division avec huit autres équipes et nous avons terminé cinquièmes, aux portes de la qualification. Il s'avère alors que Singapour a cherché à progresser dans le milieu rugbystique, car cette sélection est actuellement dans le groupe B de l'Asie. Elle joue contre le Sri Lanka ou la Thaïlande. Mais son ambition est aujourd'hui d'atteindre le groupe A et de disputer des matchs contre Hong Kong notamment. Pour monter dans le groupe A, selon les règles de World Rugby, il faut avoir au moins 7 équipes dans la première division. La Fédération a donc rassemblé la première et la deuxième division pour créer une ligue à sept cette saison.
World Rugby dévoile officiellement les contours de la future Ligue Mondiale, le 6 Nations révolutionné !De plus, pour intégrer l'équipe nationale, il faut, comme ailleurs, avoir passé trois ans dans le pays, mais également jouer en première division. Du coup, le problème, c'est que, l'an dernier, tous les Français éligibles sont restés avec les équipes de la première division pour pouvoir prétendre à l'équipe nationale. Mais cette année, ils sont tous revenus au XV Gaulois, y compris ceux qui étaient éligibles et qui avaient déjà joué pour l'équipe nationale. Ce qui fait que nous avons réalisé une très bonne saison, même si nous ne jouons que la finale de Plate (cinquième place) aujourd'hui. Elle se déroulera ce week-end (samedi 23 mars face à la réserve des Wanderers), sachant que le championnat a commencé fin novembre. Cette période assez courte s'explique par le fait que Singapour soit une cité-état et qu'il y a très peu d'équipes (11 dont 4 réserves et 1 forfait général).

La saison de rugby à XV est donc très courte, jouez-vous d'autres formes de rugby le reste de l'année ?

Depuis l'année dernière, la ligue s'est bien structurée, et il y a désormais un tournoi de rugby à 7 auquel on a participé. On a fini troisième l'an passé et cette saison, avec les recrues que nous avons, nos ambitions sont grandissantes. Il y a également beaucoup de rugby à X dans cette région de l'Asie. Notamment en marge du Singapore Sevens (étape historique du circuit mondial à 7), il existe un tournoi international : le Midnight Tens. Cet événement se joue le samedi soir, en plein milieu du Singapore Sevens. Pour notre part, on avait joué le premier match à 19h et on avait fini à 1h du matin, en finale. Malheureusement, nous avons perdu.

Le Singapore Sevens, un élément incontournable pour les amateurs de rugby à Singapour, comme pour Pierre et ses coéquipiers.

VIDÉO. Hong Kong Tens : l’UBB Gavekal triomphe pour la seconde année consécutive

Le rugby à X est très populaire en Asie comme tu le disais, y a-t-il une explication particulière ?

Je ne connais pas vraiment l'explication...Mais ce que je peux dire, c'est qu'aujourd'hui, tous les tournois de la zone sont des compétitions de rugby à X. À Manille, ils ont un événement à X qui est très reconnu, c'est également le cas pour Bangkok, Jakarta ou Kuala Lumpur. Il y a aussi quelques tournois de rugby à 7, mais ce n'est vraiment pas la dominante. Pour ma part, le rugby à X est vraiment un bon compromis entre le 7 et le XV, et jouant devant, ça me va très bien ! (rires)

Le rugby à XV est malgré tout assez présent, comment vit-on l'effet Coupe du monde au Japon du côté de Singapour ?

Il y a un impact grâce à l'équipe des Sunwolves qui délocalise certains de ses matchs ici. Notamment lorsqu'ils reçoivent des équipes sud-africaines, pour que la distance soit moins importante. De ce fait, à chaque fois qu'ils viennent jouer à Singapour, il y a une promotion qui est faite pour la Coupe du monde de rugby. Mais à part ça, on n'en parle pas vraiment.

Super Rugby : les Sunwolves bientôt exclus de la compétition

Le rugby asiatique connaît un véritable essor ces dernières années, que ça soit à travers la Coupe du monde ou les résultats du Japon et des Sunwolves, comment vois-tu personnellement cette progression ?

Pour ce qui est de Singapour, le rugby a été principalement amené par les expatriés, des Anglais et des Australiens qui sont venus s'installer ici. Les écoles sont donc très anglicisées, et tous les locaux jouent au rugby dans le milieu scolaire, qu'ils soient dans le public ou le privé. Après, certaines écoles investissent plus au moins dans ce sport. Mais par exemple, le club des Bedok représente une école. Tous les jeunes qui vont là-bas ont donc la possibilité de jouer au rugby. Le club d'Oldham est également rattaché à une école. Une autre particularité du rugby à Singapour actuellement, c'est que le Touch Rugby prend de plus en plus d'ampleur. Rien qu'à Singapour, une cité-état de 5,6 millions d'habitants, il y a 120 équipes de Touch enregistrées au sein de la Ligue ! Cela s'explique notamment par le fait que les filles restent beaucoup au Touch plutôt que de s'engager vers le rugby à XV, où il va y avoir du contact. On a donc un nombre important d'équipes féminines et d'équipes mixtes. Le XV Gaulois a ainsi également une équipe de Touch Rugby. Deux joueurs ont notamment été sélectionnés avec l'équipe de Singapour pour participer à la prochaine Coupe du monde à Kuala Lumpur (Malaisie) au mois d'avril.

[REPORTAGE] En immersion avec l'équipe de France Men's Open de Touch Rugby [VIDÉO]

Revenons au rugby à XV, en termes de niveau aujourd'hui, quel est l'équivalent en France ?

Dans un premier temps, il faut bien comprendre que c'est un rugby totalement différent qui se joue là-bas. Ils sont beaucoup moins vicieux dans les zones de combat et donnent plus la priorité au jeu. Après, pour ce qui est du niveau, je pense qu'on se trouve vers un bon milieu de tableau de Fédérale 3. Il faut également prendre en compte l'idée que les conditions de jeu n'ont rien à voir ici... On joue sous 40 degrés avec 99% d'humidité ! Mais le niveau est quand même bon surtout avec des équipes comme les Wanderers, composés exclusivement de professeurs de sport australiens. Autant dire qu'ils sont plutôt athlétiques.

Malgré tout, le rugby reste totalement amateur là-bas ?

Oui, complètement ! Jusqu'à l'année prochaine en tout cas, puisqu'une nouvelle ligue fait son apparition : le Global Rapid Rugby ! L'idée a été lancée par un milliardaire de la Western Force en Australie (Andrew Forrest) qui a décidé de créer une ligue à part du Super Rugby (pour rappel, la Western Force ne fait plus partie de ce championnat depuis 2017) avec des règles différentes du rugby à XV traditionnel. Par exemple, lorsqu'une équipe marque un essai en partant de ses 22, cela vaut 9 points. Le jeu au pied est par ailleurs interdit. Tout est fait pour envoyer du jeu. Là, pour le coup, les mecs sont professionnels. La ligue est pour l'instant composée de cinq sélections : deux équipes dans le Pacifique (Fijian Latui et Kagifa Samoa), une équipe à Hong Kong (South China Tigers), une en Australie (la Western Force) et une autre à Singapour (Asia Pacific Dragons). Parmi les joueurs composant la formation singapourienne, on a rencontré il y a quelques jours un deuxième ligne qui jouait à Bordeaux ou encore un pilier qui jouait à Grenoble. Malgré tout, le Global Rapid Rugby ne débutera qu'à partir de la saison prochaine (sous sa forme initialement prévue à savoir huit équipes. Pour autant, des matchs vont déjà avoir lieu cette année entre les cinq formations citées au-dessus).

Le Global Rapid Rugby va-t-il remplacer le rugby ?Vivre à Singapour permet également d'assister à des rencontres prestigieuses comme Nouvelle-Zélande-Australie pour une petite dizaine d'heures de vol...

et bien entendu de faire du beach rugby !

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  • breiz93
    97092 points
  • il y a 5 ans

Il n'arrête pas de parler de tournée,..., il est alcoolique ?
Content de la reprise de la rubrique.

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