Coupe du monde 2015. Un Français dans l'équipe canadienne : Caribou Inside #2
Canada - Coupe du monde 2015, Caribou Insode, épisode 2.
Caribou Inside, ou comment vivre la coupe du monde 2015 à l'intérieur du squad formé par le Canada grâce à Benoît Piffero.
Benoît Piffero est talonneur de Castanet (Fédérale 1) mais fait surtout partie du squad sélectionné par le Canada pour disputer la Coupe du monde 2015. Durant la compétition, il a accepté de nous faire vivre l’événement de l'intérieur du groupe formé par les Canucks. La semaine dernière, il évoquait son histoire personnelle dans l'épisode 1. Place désormais à la préparation estivale, au PNC et à un certain Jamie Cudmore...

Caribou Inside, épisode 2... c'est parti !

La Coupe du monde de rugby, c'est aussi une préparation physique intensive. En France, on en a fait des caisses avec les fameux wattbike. Mais une préparation made in Canada, ça ressemble à quoi ?

Contrairement à la France, qui n'a eu que trois matchs amicaux et s'est plutôt concentrée sur la préparation physique, on a disputé beaucoup plus de rencontres. On a eu une première semaine de camp avec un groupe de quarante-cinq avant un premier cut pour passer à trente-cinq joueurs. Ensuite, place à la Pacific Nations Cup sans quelques cadres comme Jebb Sinclair, Taylor Paris, Jamie Cudmore. À titre personnel, je n'étais pas dans le groupe contre le Japon (défaite 6-20) et les Etats-Unis (défaite 13-15), j'étais remplaçant contre les Tonga (défaite 18-28), les Samoa (défaite 20-21) où ça s'était plutôt bien passé.

Coupe du monde 2015. Un Français dans l'équipe canadienne : Caribou Inside #2

Quatre matchs, quatre défaites... Qu'en a dit le sélectionneur ?

C'est forcément problématique. Au rugby, il faut gagner. Là où on essaie de ne pas tout remettre en question, c'est qu'on se rend compte que quand on arrive à jouer notre jeu, à suivre les systèmes, on arrive à marquer des essais. Le problème, c'est qu'on fait tout le temps les mêmes fautes. On fait beaucoup de maladresses, des grosses erreurs défensives en prenant des essais avec zéro plaquages manqués... Contre les États-Unis ou les Samoa, on perd le match dans les derniers instants de la partie. Il manquait aussi des joueurs qui vont nous faire du bien pendant le Mondial. Maintenant, c'est vrai qu'être 17e au classement mondial, ce n'est pas top. On a rarement été aussi bas.

Après le PNC, vous avez pu bénéficier d'une semaine de break avant d'enchaîner par un stage commando du côté d'Ottawa. On imagine facilement qu'il a dû piquer.

Ça a été court... mais très très intense. Comme je le disais, on a beaucoup joué cet été, donc on ne pouvait pas se permettre de faire 100% de physique en délaissant la partie rugby. Mais après le PNC, les dirigeants ont voulu nous faire vivre une expérience avec l'armée, on a été entre les mains des militaires pendant 36 heures. Ça a été rude, ils ont voulu nous en faire baver jusqu'au point de rupture, le but du jeu étant de rester solidaires. C'était physique, certes, mais énormément mental. Je peux vous dire que la bière qu'on nous a offerte en sortant du stage, c'est une de celles qu'on a le plus savourées. (Rires) Je n'ai pas le droit de rentrer dans les détails mais on a fait huit activités, rien que le premier jour : on avait rendez-vous à 4h du matin pour terminer la journée... à 22h30. On a tous dormi dans la même tente mais certains n'ont pas pu à cause des ronflements. On a été réveillés à 3h du mat' le lendemain. Je peux te garantir que les deux jours off qui ont suivi ont fait du bien, mais on était tellement crevés qu'on n'a pas pu faire trop les cons (Rires). C'était une sacrée expérience.

Après ce stage, vous basculez sur la préparation d'un nouveau match contre les USA.

C'était particulier parce qu'on était 35, et on savait qu'il fallait être 31 à la fin. Malheureusement, le coach a été aidé par deux blessures, notamment celle de Taylor Paris. On a de très bons ailiers comme DTH Van der Merwe (Scarlets) ou Jeff Hassler (Ospreys) mais c'est une énorme perte car au-delà d'être un super joueur, Taylor est un mec génial qui joue avec le cœur. Le lendemain du match face aux Etats-Unis, on a annoncé aux deux joueurs non conservés – dont mon ami Jon Phelan - qu'ils ne feraient pas la Coupe du monde. C'était un peu triste, mais j'étais très content de faire partie de ce groupe-là. Quelques jours plus tard, on a eu l'introduction devant tout le monde et on a reçu nos blazers rouges, comme le veut la tradition.

Coupe du monde 2015. Un Français dans l'équipe canadienne : Caribou Inside #2

La suite, p. 2


Parlons un peu de Jamie Cudmore, qui a failli déclarer forfait pour la compétition...

Il est très attaché à la sélection. C'est sa 4ème coupe du monde ! Il n'a pas trop l'occasion de jouer avec le Canada en novembre ou l'été, mais ça fait deux ans qu'il a repris sérieusement avec l'équipe. Jamie, c'est vraiment notre porte-drapeau. D'une, c'est le meilleur joueur de notre équipe. Et de deux, son comportement est irréprochable. C'est quelqu'un de très simple mais quand il parle, on a envie de le suivre.

L'ambition des Canucks pour la Coupe du monde, c'est quoi ?

On n'a encore rien fixé, mais c'est vrai que c'est une compétition qui correspond à notre équipe. J'aimerais dire qu'on a coché le match de la Roumanie mais on a vraiment cette volonté de tout donner, sans parler du résultat final, d'essayer de tenir la dragée haute le plus longtemps possible à la France et l'Irlande. Pourquoi ne pas accrocher l'Italie... On sait très bien qu'on ne part pas favoris mais on va essayer de jouer la carte à fond. Je ne crois pas que le Canada ait déjà eu des individualités aussi fortes dans son histoire. Il y a vraiment un gros potentiel si on se trouve en tant qu'équipe.

Et au pays, vous sentez un engouement autour de votre équipe ?

Engouement, c'est un grand mot ! C'est vrai que le rugby est beaucoup moins développé au Canada qu'en France, mais depuis l'annonce des 31, on sent que ça monte un peu dans les médias. J'ai eu quelques sollicitations car je suis le seul joueur de Québec et de Montréal, mais il n'y a pas de grosse pression sur nos épaules, à part celle de la communauté du rugby qui souhaiterait une victoire.

Pour ceux qui ne connaissent que très peu l'équipe canadienne, que peux-tu nous dire sur ses forces et ses faiblesses ?

Il y a beaucoup de joueurs qui viennent du 7 et n'ont pas beaucoup l'occasion de disputer des matchs à 15. C'est problématique sur certains postes comme à l'ouverture ou à la mêlée. Dans l'année, jusqu'à cet été, on a l'occasion de se voir seulement deux fois trois semaines... C'est court pour inculquer un équilibre au sein de l'équipe. Pour le côté positif, j'ai envie de parler de l'état d'esprit. Beaucoup de nos joueurs jouent au Canada et ne sont pas professionnels. Certains ont quitté leur travail pour participer à la Coupe du monde. On ne fait pas ça pour l'argent mais pour l'amour du maillot.

Tu as quitté ton boulot pour aller en Angleterre ? Qu'est-ce que tu fais dans la vie, en dehors du rugby et de la Fédérale 1 ?

J'ai validé un Master en commerce et vente. Je savais que ça allait être difficile de trouver un emploi avec le contexte qui était le mien entre les entraînements en Fédérale 1 et mes sélections, la coupe du monde programmée... J'avais trouvé un CDD de commercial dans une boîte d'intérim basée dans le bassin toulousain, qui courait jusqu'en juin, avec peut-être la possibilité d'y continuer si je n'étais pas sélectionné. Côté rugby, j'ai eu un petit différend avec mon entraîneur à Blagnac mais Castanet (Fédérale 1) me permet de rebondir dans la région, de continuer à faire du rugby de haut niveau, même si la volonté de signer un jour un contrat pro existe. La Coupe du monde peut me servir de tremplin ? Oui, mais je ne me prends pas la tête par rapport à ça : arrivera ce qu'il arrivera, je suis déjà très chanceux d'en être arrivé là.

Enfin, pour clore cet épisode 2, parle nous de ton meilleur souvenir sous ce maillot canadien.

Ma première sélection contre la Géorgie, dans un contexte difficile avec la bagarre, ça pouvait faire peur ! La plus grosse question que je me posais, c'était sur la mêlée. Pour l'anecdote, quand je suis rentré, il y avait Davit Kubriashvili en face de moi, que j'ai connu à l'époque de Montpellier. Sur la première mêlée, il m'a mis la main sur l'épaule et m'a dit « Pif, comment ça va ? ». Ensuite, juste avant de rentrer au vestiaire, Mamuka Gorgodze était sur le point de mettre une mandale à notre 3e-ligne et je lui ai demandé de se calmer en français. Il m'a regardé et quand il a vu que c'était moi, pareil, il m'a demandé comment j'allais. C'était marrant.

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  • Mr Bricolage
  • il y a 8 ans

Gorgodze, le gars distribue les baffes et demande des nouvelles à un vieux pote en même temps, ou comment illustrer les valeurs du rugby 😊

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