Vaches, mousson et valeurs, un Français s'est mis au diapason du rugby indien
Nicolas Poulain ne pensait pas trouver un club en Inde.
En Inde pour des raisons professionnelles, Nicolas Poulain ne pouvait se résoudre à laisser le rugby de côté malgré les difficultés.

Quel a été ton parcours rugbystique avant de partir pour l'Inde ?

J’ai découvert le rugby en rentrant de Colombie en seconde. J'ai été introduit à l’équipe de rugby du Chesnay grâce à un ami. Ce sport a été pour moi une révélation et j'ai été, à partir de ce jour-là, un grand fan. J’ai joué 4 ans en club puis, à cause de mes études en classe préparatoire, j’ai dû lever un peu le pied. Mais pas question d’arrêter. Avec des amis nous avons repris l’équipe de rugby et nous avons organisé des matchs les samedi après-midi. Cela permettait de bien décompresser et de se défouler un peu.

Puis est venu le temps de l’école d’ingénieurs à Lyon et du rugby beuverie. L’ambiance était excellente malgré des résultats parfois en berne, on a réussi à faire une première saison à 0 victoire. J’ai même eu l’occasion d’entraîner cette équipe de bras cassé (ils se reconnaîtront) qui était bien meilleur à descendre des pintes qu’à planter des essais. Mon seul regret, c’est d’avoir perdu les deux seuls derbys que j’ai joués contre l’école de commerce d’en face.

À la fin de mes études je suis retourné à Paris où j’ai joué pour une équipe folklorique : le XV de la Moustache. J’ai retrouvé cette ambiance d’école d’ingénieurs, mais avec des gens qui avaient tous joué en club. En tout cas, la cohésion était très bonne, les matchs étaient engagés et la bière toujours présente lors des débats post victoires.

Est-ce la première fois que tu joues à l'étranger ?

Non, j’ai eu la chance de jouer en Angleterre dans une équipe de Londres. L’ambiance était vraiment incroyable : les familles des joueurs se regroupaient autour du terrain et on avait le droit à des chansons à chaque essai, placaque et bien sûr boulette … La troisième mi-temps était aussi une religion : l’équipe avait un bar où l’alcool coulait toujours à flots. C'était marrant de se confronter à des équipes anglaises qui jouent bien plus physiquement que nous Latins. D’ailleurs un peu trop, car j’ai réussi à me déboîter le coude sur un raffut.

Comment t'es-tu retrouvé en Inde ?

J’étais en poste à la défense quand j’ai été contacté par pour partir en VIE en Inde. Dès que j’ai su que j’avais la chance de vivre une expérience aussi dépaysante, je me suis lancé à fond dans l’aventure. La première chose qui frappe quand tu arrives en Inde c’est le bordel et la pollution. La première bouffée d’air indienne a été assez étouffante, ça prend vraiment à la gorge. Du coup, pour rejoindre mon hôtel à Delhi, j’ai pris un taxi et là j’ai vraiment rigolé : on est dans le seul pays où des embouteillages sont créés par des vaches et où c’est celui qui klaxonne le plus fort qui a la priorité.

Maintenant cela fait quatre mois que je suis en Inde et la phrase qui résume bien ce pays est : « in india one thing is possible : everything ». C’est assez dur de décrire ce pays ô combien différent mais ici la vie ici ne s’arrête jamais et chaque coin de rue regorge de surprises.

Comment as-tu trouvé un club ? 

Ma situation est assez compliquée car je suis 80% du temps sur un chantier en plein mileu de l’inde dans une ville assez isolée et 20% du temps à Delhi. Du coup, à mon départ en Inde, je croyais devoir faire une croix sur mon sport de prédilection. J’ai eu de la chance d’être mis en contact avec des Anglais de l’ambassade qui font des Tag rugby tous les dimanche. Le niveau est assez homogène et on rigole plutôt beaucoup. A la fin de cette heure épuisante, on se retrouve tous au pub de l’ambassade : c'est un vrai bonheur de savourer une bonne vieille London Pride en Inde !Mais sur site, je suis vraiment en plein milieu de l’inde dans la petite ville de Bilaspur dans la région Chhattisgarh. C’est un endroit très très reculé et rien ne m’amener à penser qu’il y avait une équipe de rugby. Mais heureusement que les réseaux sociaux existent et grâce à Facebook, j’ai réussi à trouver la page de l’équipe locale. Les premiers échanges furent très brefs car ils ne parlaient pas bien anglais mais j’ai réussi à leur faire comprendre que je souhaitais jouer avec eux. Leur capitaine a d’abord voulu me voir, et il a halluciné de voir un « blanc » qui joue au rugby dans sa ville.

Puis deux semaines plus tard, il m'a présenté à son équipe et j'ai compris que je vivais dans une certaine bulle avec ma boite. J'ai été surpris de l’état déplorable du terrain mais aussi de la précarité de leur équipement : nous avons parfois des vaches qui broutent au milieu du terrain et leur ballon sont de vraie savonnette. Quand je suis arrivé, ils se sont tous mis en ligne et ont gueulé un "welcome sir !!!" C’est assez surprenant sachant que je n’ai que cinq ans de plus qu’eux. Puis nous avons joué pendant deux heures et j’ai été surpris de la vitesse et de l’explosivité de certains. Ils ont de grosses lacunes techniques mais au moins ils ont un très bon cardio. Puis à la fin de séance, j’ai dû passer plus de 20 minutes à prendre des selfies avec chaque membre de l’équipe… Je suis une vraie star du ballon ovale indien maintenant (rires).

A ton niveau, que peux-tu nous dire sur le rugby en Inde ?

Le niveau n’est pas exceptionnel mais on peut dire que c'est normal pour un pays où le criquet est roi. Les Indiens ne sont pas très grands ni très physiques mais ils ont une bonne endurance. Après le manque de visibilité du rugby et d’organisation de la fédération fait que le niveau est bas. Ensuite le rugby en Inde vit grâce à quelques passionnées qui essayent de transmettre cela à leurs amis. Le sport en Inde n’est pas ancré dans les mœurs comme nous en Europe : je n’ai jamais vu un Indien faire du jogging (la pollution à Delhi ne pousse pas à cela). En ce qui concerne les matchs, l’éloignement entre les différentes équipes est une vraie difficulté : par exemple mon équipe de village a dû faire 29h de train pour un tournoi amical à Goa.Le Rugby Slums Club Chennai continue d'aider les enfants des bidonvilles en Inde

As-tu envisagé de t'investir pour développer le rugby en Inde ou aider le club dans lequel tu es à présent ?  

Je ne suis disponible que le dimanche, du coup cela limite un peu mon investissement. Grâce à un ami qui est venu me voir en Inde, j’ai pu leur acheter des ballons. Vous n’imaginez pas la gratitude qu’ils avaient. J’essaye d’ailleurs en ce moment de leur faire fabriquer des maillots pour leur prochain tournoi.Lors des entrainements, j’essaye de leur apprendre les bases du rugby : la profondeur, la passe, le soutien et bien sûr le plaquage ! La barrière de la langue complique un peu la chose : mais avec un grand sourire et des gestes, on arrive à faire progresser un peu l’équipe. Il faut aussi se rendre compte aussi que les relations homme/femme en inde sont assez particulière : les Indiens sont assez surpris quand je passe du temps à entrainer les filles qui sont souvent mises de côté.Le temps d'un tournoi, de jeunes rugbywomen indiennes ont découvert Paris et Marcoussis

Quel moment t'a le plus marqué en Inde ?

Je dirai que les entraînements lors de la mousson sous une pluie diluvienne restent un souvenir mémorable : on a vraiment bien rigolé et à la fin c’était plutôt de la lutte dans la boue que du rugby. De plus à la fin de l’entraînement, on devait aussi éviter les vaches qui étaient venues boire dans la flaque d’eau centrale du terrain… En gros du n’importe quoi !Personnellement, j’aime bien aussi côtoyer des Indiens qui vivent parfois dans la précarité. C’est vraiment touchant quand tu apprends qu’ils se cotisent tous pour m’acheter une bouteille d’eau pour l’entraînement ou qu’ils t’invitent à dîner chez eux : bon je n’ai pas mangé grand-chose vu que la nourriture était trop épicée et que j’étais rouge à cause de cela mais l’intention y est : l’immodium et le smecta sont vraiment des alliés de poids face à certaines épreuves de la vie indienne.

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c'est moi où y'a des filles dans ton équipe ? ??

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