L'Immonde du Rugby N°44
L'Immonde du rugby nous fait revivre les deux finales de Coupe d'Europe... voyage au bout de l'ennui avec Biarritz - Toulon, et orgie de rugby avec Leinster - Ulster.
Ce week end, Ovale Masqué était l'envoyé spécial du Rugbynistère à Londres, pour couvrir les deux finales de Coupe d'Europe. Notre super héros favori était censé vous livrer un compte rendu de son expérience dimanche soir. Hélas, les choses ne sont pas passées comme prévues et nous avons du contacter l'ambassade de France pour faire libérer Ovale, qui pensait « s'adapter aux coutumes locales » en s'adonnant au lancer de nain, à l'ébriété et à l'exhibitionnisme en pleine rue. Heureusement, le voici de retour et pour se faire excuser de son retard, il vous offre un Immonde 2 en 1, comme un symbole de shampoing sponsorisé par Dimitri Yachvili. Un programme éclectique donc avec le résumé des deux finales du week end : si on était au Festival de Cannes, ça aurait un peu été comme enchaîner un film d'auteur hongrois sans sous titres avec le dernier blockbuster américain à la mode..

L'Immonde du Rugby N°44

Une journée au boulot comme une autre pour Brad Thorn, qui s'apprête à gagner le 72ème trophée de sa carrière


La Coupe d'Europe de Rugby, cette formidable compétition qui dure 8 mois et épuise inutilement 22 équipes puisqu'on sait bien qu'à la fin c'est soit Leinster soit Toulouse qui gagne, a enfin connu son dénouement samedi à Twickenham. Une finale qui a été à la hauteur des attentes, mais avant d'y revenir, commençons par évoquer celle de l'Heinekid Cup, la Coupe d'Europe sans alcool où la fête est rarement folle.

Après un échec à Marseille contre Cardiff en 2010, Toulon a crié Amlin pour qu'elle revienne et accède pour la seconde fois en deux ans à la finale de la compétition la moins prestigieuse du monde après la Coupe de la Ligue de football. Face à eux, les Toulonnais retrouvent les Biarrots, qui ne sont pas parvenus à se qualifier pour les ¼ de finale de H Cup, mais qui ont été repêchés en Challenge avec succès puisque dans cette compétition aucun club italien n'était présent pour les humilier. Pour la plupart des clubs européens, être repêché en Amlin c'est une sorte de double peine, mais pas pour le Yachvili Olympique, car cette compétition représente pour eux le dernier espoir de décrocher un billet pour la grande Coupe d'Europe la saison prochaine. Et quand on sait que grâce aux droits TV qui découlent d'une telle qualif, le Bého pourra continuer à recruter des artistes tels que Benoit Baby, on comprend à quel point cet objectif est vital pour eux. Les Toulonnais de leur coté s'en foutent un peu, à l'image de Mourad Boudjellal qui est tellement bling bling qu'il ne supporte pas d'être diffusé sur une chaîne de ploucs comme France 4.

En Top 14, qui dit match du vendredi soir dit désespoir. Et bien en Coupe d'Europe c'est pareil : Vendredi dernier, le Challenge Européen, c'était surtout le challenge de ne pas s'endormir devant une des pires purges auxquelles on a pu assister cette saison. Une sorte de best of de tout ce que le Top 14 peut produire de pire, avec deux équipes qui refusent le jeu et qui jouent pas pour ne pas perdre. Et même mieux avec Toulon qui a donné l'impression de jouer pour ne pas gagner non plus, et ce jusqu'à la 80ème minute avec cette tentative de drop qui n'arrivera jamais, Sebastien Tillous-Borde ayant préféré creuser un tunnel sous le Twickenham Stoop - un peu comme dans le jeu vidéo Lemmings - que de passer son ballon à Jonny Wilkinson.

Si l'on peut aisément comprendre qu'une équipe comme Biarritz cherche à fermer le jeu, sachant que leur joueur le plus talentueux derrière s'appelle Marcelo Bosch (ne riez pas) et qu'il n'était même pas titulaire, on se demande par contre comment les Toulonnais ont pu jouer avec un manque d'ambition si flagrant. D'autant plus que les Biarrots étaient cramés dès l'heure de jeu et avaient réussi à se prendre 3 points en jouant à 15 contre 13, après les cartons jaunes d'Hayman et Armitage. Et on ne parlera même pas de la façon dont le RCT a pulvérisé les Basques en mêlée ce qui, généralement, aide quand même bien à remporter un match. En dépit de tout bon sens, les Toulonnais ont passé leur soirée à jouer au ping pong rugby. Enfin même plutôt au badminton rugby, avec un déambulateur. Un piètre spectacle qui a provoqué les huées des supporters toulonnais et biarrots qui avaient payé le déplacement pour voir « ça », ainsi que des quelques Anglais présents, scandalisés qu'on puisse jouer encore plus mal qu'eux.

Face à une équipe qui cumule 824 sélections internationales mais pas un seul cerveau valide sur les terrains, Biarritz avait toutes les armes pour s'imposer puisque les Basques eux disposent d'un cerveau. Oui, un seul, c'est peu, mais c'est celui de Dimitri Yachvili donc ça vaut au moins 6 cerveaux de Luke Burgess. On peut ne pas forcément apprécier le style de Schlomo-Sean, qui anime le jeu avec la même vivacité que Laurent Romejko anime des Chiffres et des Lettres, mais il faut reconnaître que le stratège du Bého s'est régalé contre Toulon, notamment en première mi-temps où il s'est amusé à trouver des touches de 60 mètres et à faire courir ces pauvres Toulonnais dans tous les sens, en plus d'enquiller les pénalités les yeux fermés. Puis surtout Dimitri nous a offert son chef d'oeuvre, de loin le plus beau geste du match. Le coup de pute ultime, celui dont même Agustin Pichot rêve toutes les nuits :



Alors évidemment c'est pas très fairplay, mais imaginez le même geste en finale de la Coupe du Monde sur Richie McCaw, vous auriez probablement bondi de votre canapé pour l'applaudir, voire pour lécher votre écran. Puis Craig Joubert lui aurait mis un rouge et il aurait certainement pris une peine de prison à perpétuité en Nouvelle-Zélande, ce qui aurait entraîné le suicide de Serge Blanco, la relégation du Bého, etc. Bref on aurait bien rigolé. Mais revenons-en à ce qui ne nous intéresse pas et à ce match, donc logiquement remporté par Dimitri Yachvili contre l'armée des zombies à crêtes tapeurs de chandelles. Le Bého décroche par là-même son premier titre européen et sa place en H Cup. Un match qui aura également été le dernier de Sylvain Marconnet. Le pilier biarrot doit sûrement avoir beaucoup de regrets puisqu'il a dû se dire qu'en jouant à ce rythme-là, il aurait encore pu continuer sa carrière jusqu'en 2027.

Du coup on finit par comprendre et même excuser ces arbitres britanniques et irlandais qui font toujours tout pour défavoriser les clubs français en Coupe d'Europe : Ils pensent au spectacle ! Après avoir vu la finale de H-Cup 2010 entre Toulouse et Biarritz (récidivistes!) et celle de l'année suivante, sublime, entre le Leinster et Northampton, on a beau être patriotes, le choix est vite fait.

La transition est parfaite : Après la purge du vendredi soir, tous les amateurs de rugby attendaient le grand match, la finale entre le Leinster et l'Ulster. Pourtant c'est dans une ambiance de deuil que Mathieu Lartot et Raphael Ibanez prenaient l'antenne : les pauvres allaient encore se faire engueuler par France 2 à cause des audiences à la con de cette finale. Pour rappel, celle de l'année dernière avait été suivie par 1,2 millions de téléspectateurs, ce qui est inférieur au score des rediffusions de Louis la Brocante. Il faut dire que le téléspectateur moyen n'arrive toujours pas à faire la différence entre le Leinster et Leicester, et que l'Irlande du Nord tout le monde s'en branle à part quand il y a des bombes ou que U2 fait des chansons dessus. Pourtant à la vue de la gueule et du jeu affiché par les deux équipes, on peut s'attendre à quelque chose de sympa.

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La H Cup c'est aussi l'occasion de s'assurer que le bon goût de Max Guazzini s'exporte dans toute l'Europe.


Du coté du Leinster, on retrouve la même équipe que d'habitude, c'est à dire l'équipe d'Irlande au complet sauf que bizarrement, là ils jouent bien (à croire que le Trèfle porte la poisse) + Richardt Strauss, Isa Nacewa et Brad Thorn pour remplir les quotas diversité avec un aryen, un bronzé et une personne âgée. Chez l'Ulster, on a également quelques internationaux irlandais (Best, Wallace, Ferris, Trimble...) des pré-retraités sud-africains (Pienaar, Muller, Terblanche...), un All Black qui ne rêvait apparemment pas des plages du sud de la France (Afoa), et de quelques jeunes qui incarneront probablement la relève du XV du Trèfle, comme Craig Gilroy ou Darren Cave. Attention, quand on dit relève, ça veut dire qu'ils peuvent espérer décrocher leur première sélection à 32 ans, tant la génération actuelle semble increvable. On ne tardera d'ailleurs pas à le vérifier plus tard dans le match. Parmi ces jeunes Irlandais, on remarque aussi la présence de Paddy Jackson, 19 ans, et qui joue seulement son second match de H Cup après sa belle performance en demie contre Edimbourg. Pour se retrouver titularisé en finale à son âge il a sans doute beaucoup de talent mais pourtant très vite, on sent le profil idéal de la victime : il ressemble au puceau de la fac dans un teen movie américain, et en plus il est roux avec plein de tâches de rousseur. Bref il ressemble à Corky. Si vous ne connaissez pas Corky (ni les Lemmings) c'est que vous êtes trop jeunes, ou alors que je suis trop vieux et qu'il serait grand temps que je trouve enfin un job. J'en profite donc pour vous signaler que j'accepte vos offres d'emploi à [email protected].

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Quand même ce bisounours de Raphaël Ibanez se fout de ta gueule, c'est vraiment que tu passes à coté de ton match.


Notre ami Corky donc, a la charge de donner le coup d'envoi de cette finale de Coupe d'Europe, ce qu'il fait avec plus de talent que David Skrela puisque le ballon réussit à faire 10 mètres. Dès le début du match, on voit bien que les Ulstermen n'ont rien compris à la vie puisqu'ils se lancent dans un début de match façon Northampton 2011, tambour battant. Darren Cave réalise la première percée du match au bout de 4 minutes. L'essai n'était pas loin mais les Leinstermen réussissent à récupérer le ballon dans le ruck, au prix d'un tour de magie dont eux seuls ont le secret.

Pour ceux qui se le demanderaient, signalons que l'arbitre du match était Nigel Owens, le Eric Besson du rugby. Après avoir aimé d'amour le Munster pendant de longues années, Nigel a suivi le sens du vent et est désormais le supporter numéro 1 du Leinster : il les arbitre en poule, en ¼, en ½, en finale, il s'habille dans leur vestiaire, prend sa douche avec eux, fait le chemin du retour avec eux dans le bus, etc. C'est bien simple, depuis, Paul O'Connell a le cœur brisé, et le colosse roux enchaîne les blessures. Il n'y a pas de mystère. Malgré cet arbitrage maison, l'Ulster poursuit sa domination et inscrit logiquement les premiers points du match grâce à Pienaar, qui n'aura existé dans ce match que par son jeu au pied et sa capacité à inspirer à Mathieu Lartot ses plus beaux jeux de mots. Une pénalité qui signera l'arrêt de mort des Irlandais du Nord.

La machine du Leinster démarre enfin : la touche est propre, la mêlée solide (alors qu'on pensait que l'Ulster dominerait dans ce secteur), les lancements sont fluides et dynamiques, les temps de jeu s'enchaînent, les joueurs avancent à chaque impact. Pour le fun ils s'amusent même à se faire des passes à l'aveugle de temps en temps. On dirait du rugby à 7, à la différence notable que les Leinstermen ont l'air d'être 30 sur le terrain. Pour leur première incursion dans les 22 adverses, les Dublinois vont directement à l'essai grâce à Sean O'Brien, qui est définitivement le chaînon manquant entre l'homme et la Batmobile.

S'ensuivra le grand exploit du match : l'Ulster va réussir à ne pas encaisser de points pendant au moins 15 minutes. Jusqu'à ce que Brian O'Driscoll, en forme olympique (peut être car il n'a joué que 6 matchs cette saison, ce qui est en dessous de sa moyenne habituelle de 11 matchs annuels), ne réussisse à passer les bras pour O'Brien, lancé plein champ. Le flanker irlandais sera rattrapé à quelques mètres de la ligne mais Cian Healy, le seul pilier au monde qui marque plus d'essais que Vincent Clerc et Julien Malzieu réunis, passe la ligne en force quelques secondes plus tard. 14-3, ça sent déjà la bonne grosse branlée.

Pourtant l'Uster remet la main sur le ballon et parvient à pénétrer dans le camp du Leinster. C'est à ce moment là que Corky décide d'annihiler une action de jeu intéressante en ratant un drop à 10m en face, dans une parfaite imitation de Lionel Beauxis. Heureusement, juste avant la mi-temps Ruan Pienaar est de retour pour passer une pénalité de 55 mètres en coin qui ramène le score à 14-6. Pour rigoler un peu, on se rappellera que lorsqu'ils évoluaient ensemble aux Sharks, c'était Michalak et non pas Pienaar qui était chargé du rôle de buteur.

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A la différence du Top 14, les passes après contact et les chistéras sont autorisées en H Cup


De retour sur le terrain, notre ami Corky se dit que l'écart au score n'est pas suffisamment grand, et décide donc de taper directement en touche pour en offrir une intéressante (© Christian Jeanpierre) au Leinster. C'est là qu'on découvre qu'en plus de se passer le ballon comme des Fidjiens sous extasy, les champions d'Europe sont également capables de faire des groupés pénétrants comme Bègles-Bordeaux dans les années 90. La tortue bleue progresse sur 10 mètres et pulvérise les pauvres Ulstermen, qui n'ont plus rien d'autre à faire qu'effondrer le maul pour éviter de se prendre un essai. Et là, d'un coup, Nigel Owens décide d'aller sous les poteaux et d'accorder l'essai de pénalité. Rappelons qu'il s'agit bien du même mec qui fait au moins refaire 7 fois une mêlée avant d'accorder un essai de pénalité à un club français qui martyrise son adversaire à 5m de la ligne. Sacré Nigel.

21 à 6 pour le Leinster. Les conditions sont donc idéales pour que l'Ulster amorce son retour de l'enfer et inflige un 0-30 à son adversaire. Sauf que l'Ulster va préférer la jouer à l'écossaise, en gardant le ballon pendant 20 minutes, à se faire des passes devant la défense pour avancer d'un centimètre à chaque temps de jeu. Un effort remarquable qui leur permet de marquer ENFIN un essai par Tuohy, à l'heure de jeu. Évidemment, après ça, les Irlandais du Nord sont crevés comme s'ils venaient de traverser l'Atlantique en pédalo.

Le Leinster peut donc recommencer à s'amuser. Sexton ajoute deux nouvelles pénalités histoire de bien achever le moral des adversaires, puis dans les 10 dernières minutes, c'est festival. On fait entrer les remplaçants, les espoirs, même les porteurs d'eau et le kiné ont le droit de participer à la fête. Les passes s'enchaînent dans tous les sens, l'Ulster se fait trouer en troisième mi-temps et Cronin et Van der Merwe, respectivement talonneur et pilier, réalisent le rêve de leur vie en marquant des essais de trois quart. Ce soir, ils pourront pécho dans les bars de Londres comme s'ils étaient Clément Poitrenaud. Score final, 42 à 14, la plus grosse branlée jamais vue en finale de H Cup. Jusque là, le record appartenait à Brive (victoire 28 à 9 contre Leicester en 1997) qui aura décidément tout perdu cette année.

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Le dernier modèle du Terminator est même programmé pour répondre aux interviews !


Après le match, Brian O'Driscoll, blasé, parlait déjà de triplé. Ça tombe bien, la finale l'année prochaine est à Dublin... Une idée qui terrifie sans doute les supporters toulousains, qui perdraient là la supériorité qu'ils pensent avoir sur le rugby galactique. Enfin ayons également une pensée pour ces chers Clermontois, qui finalement, ne sont passés qu'à 2 centimètres d'une finale à leur portée....

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« Regarde Vern, ça, c'est la H Cup. C'est pas mal non ? »


Pour terminer, on vous offre une photo de la remise de la coupe, puisque France 2 n'a pas jugé utile de diffuser la séquence, celle-ci ne concernant pas le Stade Toulousain.

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La présence de Leo Cullen sur cette photo nous empêche hélas de qualifier les Irlandais de beaux vainqueurs.

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  • taliesin
  • il y a 11 ans

Je me suis fait exactement la même réflexion sur l'essai de pénalité...les grands esprits se rencontrent

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