L'Immonde Comité de sélection N°1
Ovale Masqué aurait-il trouvé du travail ?
Ovale Masqué est de retour, et il a trouvé du boulot ! Aussi incroyable que cela puisse paraître, notre héros est désormais membre du comité de sélection du XV de France...
Chers lecteurs de l'Immonde, si vous existez toujours, nous vous devons des explications. Au cours des dernières semaines, c'est vrai, nous n'avons pas publié cette chronique avec une grande régularité. Bon, en fait, on ne l'a jamais fait. Mais là, c'était encore pire, puisque le dernier numéro remonte maintenant à trois semaines. Les rumeurs les plus folles couraient en ville : Ovale Masqué serait en pleine dépression suite à l'arrêt de la carrière de Gregory le Corvec, et aurait renoncé à écrire à tout jamais. Selon d'autres sources, il serait décédé il y a plusieurs mois lors d'une partie de roulette russe avec Julien Caminati à Budapest. Soucieux de garder sa poule aux œufs d'or - environ 5000 lectures par chronique, c'est certes moins qu'un article sur le string d'une soigneuse sud-africaine, mais c'est quand même pas mal - le Rugbynistère aurait alors décidé d'étouffer l'affaire et confié la chronique au Stagiaire de la Boucherie Ovalie. D'où le déclin qualitatif flagrant de l'Immonde depuis plusieurs semaines. Bien sûr tout cela est faux. Si le Stagiaire écrivait vraiment l’Immonde, il y aurait des GIF avec des chatons entre les paragraphes.

En fait, si notre super-héros favori est absent depuis quelques temps, c'est qu'il a désormais un travail. Un vrai, dont il peut se vanter auprès de sa chère maman : Ovale travaille désormais pour la Fédération Française de Rugby. Non ce n'est pas une blague, Ovale Masqué a en effet récemment rejoint le comité de sélection du XV de France. Mais comment cela a-t-il bien pu arriver ? Il vous raconte...


« Tout a commencé un vendredi soir sans Top 14. Ce week-end là, le match entre Clermont et le Racing métro avait été incompréhensiblement programmé le dimanche soir, ruinant tous mes projets pour la soirée (c'est à dire me saouler à mort devant un streaming pourri pour oublier la vacuité de mon existence). Je me retrouvais donc dans l'Ovale-Cave, seul, triste et désemparé, sans rien sous la main pour pouvoir m'ennuyer correctement. Comme un junkie en manque, je décidais de me rendre sur le premier site de streaming venu. Je cliquais frénétiquement sur tous les liens proposés, cherchant quelque chose à pouvoir regarder. N'importe quoi, tant que c'était flou et saccadé, ça suffirait à me rappeler mon bon vieux Top 14. Je finissais donc par me caler devant un match de hockey en bélarusse. Si vous avez déjà regardé du hockey aux Jeux Olympiques, et que vous trouviez que distinguer le palet était compliqué sur votre écran large Full HD (bande de sales capitalistes), je vous déconseille d'essayer de suivre ce sport en streaming. Mais pour ce soir-là, ça ferait l’affaire. Alors que j'ouvrais ma première bière de la soirée, je remarquais une publicité envahissante sur le coin droit de l'écran. D’habitude, sur ce genre de sites, il s’agit de publicités du type « Enlarge your mexican » ou d’autres « Rencontres des célibataires chaudes à Melun ». Mais pas cette fois. Sur une publicité rose flash d’un mauvais goût certain, clignotait cette inscription « Bravo, vous avez gagné une place pour aller voir le Stade Français à Charlety ! ».
br>Naturellement, j’ai d’abord pensé à un spam. Mais qui tenterait de monter une arnaque en proposant une place pour un match du Stade Français à Charlety ? C’était ridicule, personne n’aurait envie de cliquer. Personne sauf moi. Quand on est un super-héros au RMI, on ne peut rien refuser de gratuit, même un service à thé en fonte (que je mets en vente sur ebay, envoyez-moi un mail si vous êtes intéressés). J’entrais mon adresse email secondaire (celle réservée aux inscriptions sur les sites pornos et les forums de discussions du Top 14) et recevais quelques secondes plus tard une place à imprimer pour la rencontre entre le Stade Français et Castres. Un choc glamour entre deux prétendants aux 6 premières places. Je suppose que le Stade Fançais avait décidé de refiler un tout un tas de place pour que le stade soit un tant soit peu rempli pour « l’évènement ».

Evidemment ce n'est pas le cas et lorsque j'arrive au stade le lendemain, les tribunes sont aussi vides que les caisses du club après le passage de Bernard Laporte. Je prends place près d’un petit groupe d’autochtones qui se sont collés les uns aux autres pour lutter contre le grand froid parisien. De loin, ils ont l’air de SDF, mais habillés en rose fluo. Mais cet après-midi là, la misère est surtout présente sur le terrain. Les Parisiens, volontaires, monopolisent le ballon et font le jeu, sans jamais parvenir à concrétiser. Les en-avants s’enchaînent. Pour couronner le tout, Julien Dupuy a décidé de se lancer dans une tentative de génocide sur les pigeons de la capitale. Dans le Parisien du lendemain, on apprendra même qu’un malheureux laveur de carreaux de la Tour Montparnasse a été assommé par un ballon de rugby et est tombé dans le coma.

Le hooligan d’environ 60 ans, présent à quelques rangs de moi, commence d’ailleurs à s’agacer. Il se met à hurler « Mais bordel, faîtes entrer Porical !! ». Ca m’a fait penser aux mecs de droite qui, voyant le niveau des débats entre Fillon et Copé, prient pour un retour de Sarkozy. Ben au Stade Français c’est un peu pareil, quand tu reportes tes derniers espoirs sur Jérôme Porical, ça veut dire que c’est vraiment la merde. Affligé par ce triste spectacle, je décide de m’éclipser un peu avant la mi-temps. Je vais retrouver mon vieil ami Jean-Claude, le DJ du Stade. Jean-Claude est un des derniers vestiges du Guazzinisme : installé dans un petit stand près de la buvette, il passe des vinyles de Dalida et Adamo, pour ambiancer les coursives de Charlety. Avec ses cheveux tirés en arrière et recouvert de Pento (on aurait dit Jacques Delmas) et son nœud papillon rose, Jean-Claude a l’apparence d’un personnage appartenant au passé. Et ce sera sans doute bientôt vraiment le cas. Le Stade Français connaissant des difficultés financières, et gaspillait déjà suffisamment d’argent pour payer le salaire de Paul Sackey, Jean-Claude allait certainement être victime d'un licenciement économique. Il se retrouvera bientôt obligé de vivre en 2012, comme tout le monde. Pour avoir un petit peu d’oseille au chaud en vue de ces jours difficiles, il a donc mis au point une petite combine…

- Salut Jean-Claude. Tu as quelque chose pour moi ce soir ?

- Bien sûr, Ovale. Comme d’habitude, un petit Auradou ?

- Non. Ce match, c’est vraiment une purge. Je vais avoir besoin de quelque chose de plus fort.

- D’accord, comme tu voudras… un Roncero alors ?

- S’il te plaît.


Après lui avoir tendu un billet de 5 euros, Jean-Claude écarte une pile de vinyles ringards derrière son stand, et se saisit d’une bouteille. Discrètement, il en verse le contenu dans un gobelet rose. Le liquide émet des vapeurs jaunâtres. Le Roncero porte bien son nom. A première vue, il a l’air sympa. La première gorgée passe toute seule. Puis quelques secondes plus tard, le retour te prend par surprise. Comme un bon vieux coup de poing sous la mêlée. Un direct au foie qui te met KO pour le compte. Il faut bien ça pour supporter le niveau de jeu de l’équipe locale, et l’ambiance de funérailles des matchs à Charlety. Le business de Jean-Claude tourne à plein régime, et il est content de revoir un de ses meilleurs clients. Je regagne ma place peu après le début de la reprise, et le match me parait tout de suite beaucoup plus intéressant. A chaque en-avant, j’applaudis bruyamment. Castres marque le premier essai du match et je tente alors de faire partir une ola. Je hurle et j’interpelle tous les joueurs tour à tour pour leur dire de signer au Racing Métro. Bien sûr, vu le bruit dans le stade, ils m’entendent parfaitement. Je crois même qu’à un moment Julien Dupuy a volontairement essayé d’envoyer le ballon dans ma tribune pour me faire taire. Evidemment, le ballon a terminé sa course quelque part entre le 13ème arrondissement et la Sibérie. Peu à peu, l’effet du Roncero s’estompe. Le Stade Français revient dans le match et à égalité au score à quelques minutes de la fin. La victoire parait possible. Puis l’erreur fatale : ils donnent le ballon à Contepomi. Alors que les 80 minutes de jeu sont passées, Dr Maboule ne trouve rien de mieux à faire que de tenter un drop de 35 mètres en coin, un peu comme un joueur de basket qui tenterait un panier à trois points de son propre camp au buzzer. Encore un pigeon assassiné. J’en ai trop vu, je me décide finalement à rentrer chez moi pour ne pas rater Jour du Rugby. Et au moment où je me dirige vers la sortie du stade, un homme mystérieux m'interpelle d’une façon tout à fait mystérieuse.

- Psssstt.


L’homme est adossé à une colonne, dans l'ombre. Il porte un long imperméable et un chapeau. Derrière la fumée de sa cigarette, je ne peux distinguer son visage. Je m’approche prudemment, au cas où il s’agirait d’un contrôleur anti-dopage m’ayant confondu avec Yoann Huget à cause de ma coupe de cheveux.

- Alors Monsieur Masqué, vous en avez pensé quoi de ce match ?

- Comment est-ce que vous m'avez reconnu ? J'ai pas mis mon masque.

- C'est vrai, c'est vrai Vous préférez qu'on vous appelle Monsieur *bip* du coup ?

Il a utilisé mon vrai nom ! Comment sait-il ? Je suis en civil. A part mon taux d'alcoolémie, rien ne pouvait trahir mon identité secrète.

- Comment connaissez-vous mon nom ?

- Nous savons beaucoup de choses sur vous, Monsieur Masqué. Nous vous surveillons depuis longtemps. Cette place gratuite, vous croyez vraiment l’avoir gagnée par hasard ? Si vous êtes ici aujourd’hui, c’est parce que NOUS l’avons voulu. Vous n'avez aucune idée de l'étendue de nos moyens.

- Vous travaillez pour Serge Blanco, c'est ça ?

- Non abruti. En fait j'ai juste tapé ton nom sur google. Une recherche de 10 minutes et avec Facebook on sait tout de toi. De ton numéro de sécurité sociale à la main avec laquelle tu te branles le samedi soir après avoir maté Isabelle Ithurburu dans Jour de Rugby.

- Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ?

- Je représente la Fédération Française de Rugby. Petit… as-tu déjà entendu parler du comité de sélection ?

Le comité de sélection ! Trois mots qui sentent bon l’ex-URSS, trois mois magiques à mes oreilles. Pour moi, comme pour beaucoup, il s'agissait d'une légende… un peu comme le rôle de manager de Jo Maso en Equipe de France.

- Le comité de sélection… te fous pas de moi, ça existe pas ton truc !

- Bien sûr que si.

- C’est ridicule. Comme si on allait VRAIMENT réunir 10 mecs au tour d’une table pour débattre du prochain poste de Damien Traille…

- Tu sais petit, à la FFR, dès qu'on doit prendre une décision, je sais pas pourquoi, mais on ressent toujours le besoin d'organiser un grand buffet. D’ailleurs, on le fait aussi quand on a pas de décisions à prendre. Ben pour le comité de sélection, c'est pareil. On se met à 10 autour d'une table, on ouvre une bouteille, puis deux, puis trois, puis le lendemain quand on se réveille, on a 23 noms griffonnés sur un bout de papier. Appelle ça de la magie, appelle ça du french flair… ça se passe comme ça, c'est tout.

- Putain, tout de suite je comprends mieux comment Fabrice Estebanez a pu faire la Coupe du Monde. Mais attendez… quel est le rapport avec moi ?

- Tu es l'élu, Ovale Masqué.

- Comme dans Matrix ou le Seigneur des Anneaux ? Je vais avoir une breloque magique, ou un manteau en cuir super classe ?

- Non connard, t'auras juste un Pin's parlant avec la gueule de Thierry Dusautoir. Ca te plait ? Soyons sérieux deux minutes. Comme tu le sais, Philippe Sella a décidé de suicider sa carrière en signant à Agen. Il y a donc une place vacante au sein du comité et voilà… nous t'avons choisi.

- Pourquoi moi ?

- A cause du nouveau gouvernement. Tu sais, la parité, tout ça. Comme on avait pas de gonzesses au comité, on s'est dit qu'on allait mettre un crétin en collant violet et qu'on lui demanderait de nous faire des cafés, ça reviendrait au même.

- ...

- Non je déconne. Me demande pas pourquoi, moi je trouve cette idée totalement ridicule. Mais après tout, on vit dans un monde où même Jacques Delmas est considéré comme un grand technicien, alors pourquoi pas… puis on allait pas demander à un mec du Midol non plus, faut pas déconner.

- Mais vous voulez dire que tout ça à une réelle importance ? Que Saint André, Bru et Lagisquet prennent vraiment en compte l'avis des mecs du comité ? Genre, même celui de Fabien Pelous ?

- Tu dois savoir quelque chose, petit, c'est que PSA va mal, très mal. Sélectionneur du XV de France, c'était le job ultime pour lui. Le Graal. Il avait loupé le coche en 2007. Alors quand il a eu le poste après la Coupe du Monde 2011, il était vraiment heureux le gars. Il s'imaginait pas ce qu'il allait vivre… on a beau dire de Lièvremont, de son manque d'expérience, tout ça, mais le gars avait entraîné en Pro D2. Il avait regardé et disséqué des heures et des heures de match d’Albi ou Aurillac. Il est allé au front, il en a vu des horreurs. Il pouvait tout endurer. Phillippe, lui, c'est pas pareil. Il a toujours eu la belle vie, il a joué le titre partout où il a été, il a toujours eu un budget pour s'acheter tous les joueurs qu'il voulait. Puis d'un coup, il s'est retrouvé obligé de superviser des matchs du Top 14. D'aller voir Grenoble - Mont de Marsan, parce que par politesse, faut qu'il fasse un peu le tour de France des stades. Et il s'est vite rendu compte que là, il pouvait plus se payer McAlister ou Wilkinson comme à Sale ou à Toulon. Non, le mec maintenant il doit disséquer les performances de Michalak et Trinh-Duc, et essayer de voir lequel des deux a le jeu au pied le moins navrant. Il doit essayer de trouver un pilier droit français de niveau international qui aura moins de 36 ans pendant la Coupe du Monde 2015. Il doit essayer de rivaliser les All Blacks, tout en sachant que son trois quart centre le plus talentueux c'est Florian Fritz, et son ailier le plus rapide Vincent Clerc. Tu comprends l’ampleur de sa tâche ?

- …

- Il y a quelques semaines, il était venu à Bordeaux, superviser un match entre l'UBB et Perpignan. Il a tellement été désespéré par le spectacle qu'on l'a retrouvé après le match, sous sa chaise, en position fœtale, en train de chialer.

- Vous êtes sûr que c'était pas sa voix normale ?

- Non petit. Il chialait pour de bon cette fois. Il hurlait même. « Je veux plus jamais voir de matchs du vendredi soir, plus jamais ! ». C'est à ce moment-là qu'on a compris qu'on aurait besoin de renfort.

- Et vous pensez vraiment que moi, je peux l’aider ?

- Moi je pense rien du tout. Je suis pas là pour ça. Contente toi de savoir qu’à partir de maintenant, tu bosses pour nous. Je te contacterai dans une semaine pour te donner ta première mission.

- Et vous avez un nom ?

- Appelle moi juste « Renvoi profond ». C’est tout ce que tu as besoin de savoir….
Ah oui et un truc, si jamais tu vas couvrir un match de Clermont, n'oublie pas de dire que David Skrela a été excellent. Même s'il n'a joué que 10 minutes avant de se prendre un KO. Directives du DTN, cherche pas à comprendre.

- Ok…


Puis l’homme mystérieux s’est éclipsé. J’ai essayé de le suivre, mais il s’était mêlée à la foule (enfin, à un groupe de 5 supporters) et j’ai vite perdu sa trace. J’allais avoir besoin d’un nouveau Roncero. »
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  • Kadova
    31045 points
  • il y a 11 ans

Genial ! La suite ! La suite ! La suite !

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